Péché mortel

" Ce n'est pas parce que j'ai peur de l'enfer que je suis gentille" dit-elle en l'embrassant...

Et ce faisant elle se laissa glisser à terre et courut se cacher dans le placard de la chambre. Elle entrouvrit la porte et l’observa attentivement. Non vraiment il n’avait pas fière allure avec son ventre rebondi et ses petits yeux noirs. Comment avait-elle pu croire qu’il saurait la réconforter et la protéger toute la vie ?

La protéger de l’enfer qu’on lui décrivait à longueur de journée et qu’elle frôlait si souvent ? Comment avec sa peau fripée et ses bras tout mou, pourrait-il l’empêcher d’échapper à tous les vices qui vous garantissaient l’enfer absolu ? Ce n’est pas lui qui pourrait réfréner ses envies de gâteaux au chocolat, glaces à la framboise ou bonbons en tout genre lesquels s’étalaient sous ses yeux à la boulangerie du quartier ? Comment échapper au péché de paresse alors qu’il est si bon de ne rien faire d’autre que rêver et se prélasser au soleil ou dans son lit douillet ? Là encore, elle ne pouvait compter sur lui qui passait bien plus de temps qu’elle à dormir tranquillement dans le confort de la chambre. Et la jalousie, bien sûr qu’elle était jalouse ! Jalouse de toutes les marques d’affection qui ne lui étaient pas exclusivement destinées, de tous les compliments qui ne lui étaient pas directement adressés, des plus jolis vêtements qu’elle ne pouvait pas encore s’acheter dans les magasins de la ville. Et lui n’y pouvait rien du tout, il ne pouvait ni contenter ses envies (encore un péché !) ni l’empêcher d’être jalouse même s’il n’avait d’yeux que pour elle…

« Alors non, décidément j’ai beau avoir peur de l’enfer, je ne suis pas gentille. Pas gentille du tout tu entends ? cria-t-elle en sortant brusquement du placard. Tu ne peux rien pour moi et tu mérites donc la mort et rien d’autre ! »
Léa se saisit d’une paire de ciseaux posée sur son petit bureau et dans un geste vif l’enfonça dans le ventre d’Hector d’où s’échappèrent des copeaux de mousse.