Le choix des hommes de Dieu

La discussion est âpre dans la salle du chapitre. Ceux qui interviennent le font d’une voix basse et tendue, exprimant leurs convictions ou leurs doutes.

Assis en bout de table, Frère Michel se tait. Les yeux fermés il écoute les uns et les autres.

De longs silences ponctuent les échanges. Un de plus et c’est tout pour aujourd’hui. Un à un les neuf moines du monastère de Tibhirine quittent la salle du chapitre.

Partir ? Rester ? La décision n’est pas prise. Il faudra encore se réunir, encore se parler, encore et encore.

Frère Michel traverse rapidement le cloitre pour descendre le petit escalier vouté qui ouvre sur le potager. Il est là, face aux montagnes enneigées de l’Atlas. Seul face à ses peurs, seul face à ses doutes.

Une des phrase du Père Prieur tourne en rengaine dans sa tête : « C’est ainsi, on prend congé de soi même avant les autres, pour atténuer le coup fatal ».

Le problème est justement là ! Il n’a pas fait la paix en lui-même, il n’arrive pas à la faire ! Ecartelé entre sa foi et son envie de vivre. Etant homme avant d’être serviteur de Dieu.

Au milieu des légumes et des rosiers en fleurs, écrasé par la masse de l’’Atlas au loin, le moine s’effondre à genoux.

Partir ? Retrouver ce qu'on a fui, bruits et folies, individualismes forcenés ? Partir, c'est aussi se priver des échanges de la salle du chapitre...

Rester ? N'est-ce pas fuir sa mission en ce bas monde, être utile à quelqu'un à quelque chose, bref, être acteur dans la société contemporaine ? Rester, c'est à tout jamais s'enfermer dans la contemplation, la prière, et sans doute la monotonie...

Sherkane rend palpable le dilemme de Frère Michel et nous amène sur le chemin de la réflexion du moine qui doit choisir. Vaste sujet fort bien traité

Une référence directe au film Des Hommes et des Dieux, partir pour préserver sa vie, rester pour vivre sa foi. Un terrible dilemme.
Pour une fois, j'aurais aimé une fin un peu plus travaillée qui aurait, je pense permis d'accompagner un peu plus ce moine dans la réflexion qu'il poursuit. J'aime bien en tout cas comment tu montres la difficulté à prendre position tant que la paix en soi, n'est pas faite.

J'aime beaucoup beaucoup ce texte... et je le trouve plutôt sain (sans jeu de mot) le frère Michel avec son envie de vivre.... dans beaucoup beaucoup de cas heureusement que l'envie de vivre ait été la plus forte.

Une autre interprétation de cette consigne qui inspire tant d'univers différents.

Le moine est terrassé par la décision impossible à prendre, je trouve que tu rends bien ses doutes et ses peurs.

très beau texte sur cette nécessité de faire la paix en soi.

en même temps, ce cheminement c'est un peu comme une antenne télescopique (désolé je n'ai pas trouvé meilleure comparaison), essayez de faire la paix en soi AVANT de décider, mais c'est aussi la décision (la bonne) qui génère la paix intérieure.

Le texte évoque très bien tout cela.
Une réussite !

Merci à tous de vos commentaires

Plume, tu as raison. La fin est un peu "plaquée" mais je ne savais comment aller plus loin dans ses réflexions sans tomber dans du pathos.

AlainX, j'aime bien ta remarque : "essayez de faire la paix en soi AVANT de décider, mais c'est aussi la décision (la bonne) qui génère la paix intérieure."

"Des hommes et des Dieux," j'ai beaucoup aimé ce film
Ton texte, il est simple, beau, réfléchi et amène une autre façon de traiter la consigne

Que te dire de plus, Sherkane ? Je partage la majorité des comm' et te félicite pour l'originalité avec laquelle tu as traité la consigne !
C'est un excllent texte, une fois de plus !

Très beau texte, plein d'humanité.