Deux ans de palabres, de négociations. Recherche d’appuis politiques, enquêtes d’utilité publique, études géologiques, expropriations. Débouter les groupes de riverains hostiles au chantier. Les mêmes qui réclament le désengorgement du centre ville, les mêmes qui veulent une superbe rocade mais… loin de chez eux, pas devant LEUR portail de maison quand même ! Syndrome NIMBY classique.
Toutes les autorisations ont fini par tomber et voilà quatre mois que le chantier bat son plein. Des dizaines de gars sur le pont, de jour comme de nuit. La terre gémit sous les coups des bulldozers impitoyables. Les camions opèrent rotation sur rotation.
Le chantier avance vite et bien, comme dans du beurre. On est même en avance sur le calendrier des travaux. Aussi les chefs d’équipes ne comprennent pas ce qu’ils font ici dans ce hall d’accueil. Que veut dire ce texto sibyllin reçu ce matin sur leur messagerie et les enjoignant ipso facto de rappliquer au siège de la société des travaux.
Un à un ils rentrent dans le bureau du Big Boss. Il n’est pas seul. Avec lui, un homme. Le profil même d’un archéologue ou d’un écologiste. Les hommes flairent un coup fourré, ils ont l’habitude. On aurait trouvé des squelettes quelque part ? Des bouts de poteries ? Découvert un vulgaire insecte protégé ? Toutes ces choses ridicules qui empêchent de tourner en rond et qui ont l’art de bloquer un chantier.
Big Boss les fait assoir et sans plus tarder leur annonce la nouvelle d’une voix blanche de colère :
« Le chantier doit s’arrêter 3 semaines. Parait qu’il y a des crapauds qui fraient en ce moment et que le chantier les perturbe.»
Tout le monde sorti de son bureau, Big Boss laisse éclater sa colère. D’un geste rageur il déconnecte les lumières de la maquette représentant la rocade et son avancement.
« Foutus Amphibiens Queutards ! »