Journée normale, sur une terasse en bois, tandis que, comme toujours, elle s'acharnait à travailler sa souplesse et son Art de combat. Bien que ce championnat lui passe par-dessus la tête, il n'est pas question qu'elle perde la face devant ses adversaires en vertu de la réputation qu'elle a eu le malheur de se faire. Comme toujours, elle s'efforça de faire parfaitement ses mouvements ainsi que ses bottes secrètes. Ne pas perdre la face. Être à la hauteur de sa réputation. En somme... Devenir totalement superficielle. Génial. Devenir ce qu'elle déteste. Tel va être son véritable combat ? Non, non et non, elle se doit d'oublier ça, se concentrer sur son duel de demain, cesser de tergiverser !
Alors qu'elle continuait sans relâche à s'escrimer et à reproduire ses cascades contre des ennemis invisibles, une légère tape se fit à sa porte, comme une main immatérielle. Wazuki n'ayant rien entendu, se battait de plus belle. Quelqu'un frappa à la porte. Mais pas n'importe quelle porte, oh que non. La porte.... De sa conscience. La Championne d'Arts Martiaux s'arrêta brusquement.
Eh bien, tu en as mis du temps pour m'ouvrir...
La jeune fille écarquilla les yeux. Elle se dit immédiatement qu'elle fatiguait trop à s'entraîner telle une forcené à une heure si tardive. Ordinairement, elle faisait ses devoirs à cette heure-ci.
Eh bien, tu n'as pas changé... Toujours à te défiler dès qu'un événement sort de ta réalité...
Son sabre en bois tomba littéralement au sol. Sa conscience lui parlait ? Par le diable, comment sa conscience forcerait-elle sa propre porte ? Elle devait donc bel et bien se battre contre elle-même ?
Eh bien, te voilà tétanisée... Tu me prends pour ta propre conscience... Quelle ironie...
Wazuki se mit littéralement à étouffer un cri d'épouvante. Un cri de stupeur. Un cri de peur. Les mots lui manquèrent. Comment s'appelait ce genre de cri qu'on étouffe ? Elle crut reconnaître une de ses amies qui avait participé à la compétition. Mais ça avait mal tourné pour elle. Mais c'était quoi, cette voix ?!
Eh bien, tu commences à culpabiliser maintenant, et tu oses me demander qui je suis ? Dites donc, t'en manque pas, toi, du culot. Tu ne m'as toujours pas reconnue, et tu me prends pour quelqu'un d'autre ?
Que... Tout ce corps jeune, dans la force de l'âge, tomba sur les planches, fracassant la pointe de son sabre en bois, qui lui entailla gentiment le bras. Zakuwo ? Zakuwo, sa meilleure amie, c'était elle ? Mais que... Que signifiait donc tout ceci ? Qu'est-ce que ça voulait dire ? Sa conscience... Se serait donc réveillé... Pour avoir oublié sa meilleure amie ?
Eh bien, tu en mets du temps pour te réveiller ! Après tout ce que j'ai enduré, tout ce maudit calvaire, c'est comme ça tu m'accueilles ? C'est comme ça que tu m'accueilles après que j'ai passé je-ne-sais combien de mois dans ce maudit hôpital suite à cet " accident " dont tu es coupable ?! Ne te voiles pas la face, c'est toi qui m'avais frappé ce jour-là, toi qui a gagné en me frappant volontairement ! Tu n'imagines pas le temps fou que j'ai eu pour retrouver la mémoire, et le choc que ça m'avais fait ! Toi, lorsque j'étais amnésique, c'est à toi que je m'accrochais. Je voulais par la suite te trouver un alibi. Me frapper ainsi, je ne croirai jamais que ce n'est que dans le feu de l'action. Eh bien c'est comme ça que je suis reçue ?!
Wazuki tombait des nues. Voyant le soleil se coucher, elle voulut rentrer. Mais non. Elle restait sur le plancher, du sang coulant de son bras. Ses membres ne l'écoutait même plus. Elle culpabilisait ? Alors que, au contraire, si Wazuki n'avait pas évité ce coup en la frappant de la sorte, c'était sa mort assurée ? Que fallait-il le mieux dans une amitié ? Une morte, une vivante ou une vivante et une blessée qui guérirait ?
Eh bien, j'en ai assez vu. Là, ça suffit. J'ai compris. Madame veut garder sa coupe au détriment de son amitié. Tant pis pour toi, tu l'auras cherché.
Cette fois-ci, la jeune fille ne comprenait pas. Qui était cette voix ? Pourquoi commencer toutes ses phrases par " Eh bien" ? Et d'abord, pourquoi n'arrivait-elle pas à bouger ?
La sonnette retentit et manqua de la faire tomber de la terrasse. Qui étais-ce ?
Elle se dirigea vers le son strident, et sa surprise fut immense. Ses bras tombèrent de la porte, et elle manqua de tomber en pâmoison.
- Eh bien, fit la voix de son interlocutrice, tu en as mis du temps pour m'ouvrir...