Reportage

“Seuls le vent et le sable savaient où ils allaient"

Vers le sud sans doute, les trois enfants, deux jeunes garçons d’à peine dix ans et une adolescente dévalaient la pente à une vitesse vertigineuse. Malgré le poids de leur chargement, ils se déplaçaient avec une grâce infinie et je devinais derrière la poussière qui leur collait à la peau, des visages fins et bien dessinés, des yeux pétillants et un sourire éclatant.

Je levais les yeux vers les hauteurs. A défaut de connaître leur destination, je pourrais peut-être apprendre d’où ils venaient. mais je ne vis rien, que le ciel et le sable gris de cette montagne rocheuse. Avaient-ils plus bas, une maison, un parent, une vie d’enfant? Allaient-ils à l’école, jouaient-ils sur les terrains vagues, rêvaient-ils en dormant?

Plus probablement descendaient-ils de la mine de cuivre, leurs sacs remplis de gravas, sans doute le salaire de leur semaine de travail. Les quelques poussières d’or qu’ils auraient la chance d’extraire de leur chargement permettrait à leur famille de survivre une semaine de plus.

Malgré la chaleur, le fardeau, malgré la journée de travail, la dangereuse descente puis la longue marche jusqu’aux faubourgs de la ville, ils souriaient, s’invectivaient et riaient.

Le paysage rude et austère me paraissait tout à coup s’éclairer, se parer de couleurs, et je réalisais tout à coup que ces enfants en étaient la cause. Avant qu’ils ne disparaissent au détour d’un rocher, je saisis mon appareil photo et pris une série de clichés.
La beauté de l’instant m’avait presque fait oublier la raison de ma présence en Indonésie, et tout en reprenant ma marche je décidais que le titre de mon reportage serait:

“ Seuls le vent et le sable savaient où ils allaient”