Je cherchais des mots d'amour

J'ai marché longtemps, très longtemps
J'ai pris à droite, puis à gauche, puis de nouveau à droite
Ensuite j'ai été tout droit, semant derrière moi des petits cailloux blancs, pour ne pas me perdre.

C'est qu'on est vite noyé dans l'océan des mots, Il est bon de partir aussi loin que nos pensées peuvent nous mener, mais il faut savoir se retourner, parfois, pour témoigner, sinon à quoi sert de chercher les mots, de chasser les adverbes, d'emprisonner les verbes si la plume tout à coup refuse de dessiner les contours d'un joli texte.

Je marchais donc depuis des heures, des jours même, à la recherche du verbe aimer
Je comptais le décliner à l'infini, pour écrire une belle histoire d'amour.
Je ne sais pas écrire ce genre d'histoire, j'écris la vie, j'écris la mort, j'écris le dur labeur, mais l'amour je ne sais pas.


Je suivais donc ce drôle de chemin quand tout à coup elle m'apparut.
Une petite fille tout de rouge vêtue, semblant tout droit sortie d'une bande dessinée.
Concentrée sur le sentier, elle jouait à la marelle.
De la terre au paradis, à cloche-pied, à pieds-joints elle sautait, ramassant au passage touts mes petits cailloux blancs.
Attiré par son rire enfantin, je m'approchais d'elle.

– Que fais-tu là, à la croisée des chemins ?
– Je fais une marelle. Veux-tu jouer avec moi?
– Non merci, je suis perdu, je dois retrouver ma route.
– Il te suffit de descendre vers le sud, et tu rentreras chez toi
– Comment le sais-tu?
– Je suis là pour ça, pour tous ceux qui cherchent leur chemin. Tu joues avec moi?
– Je n'ai pas le temps, il faut que je poursuive ma quête aussi.
– Tu cherches quoi?
– Des mots d'amour, mais je ne crois pas que tu puisses m'aider, tu es bien trop jeune fillette.
– Dis moi les, et je t'indiquerai leur cachette. Il ne faut pas se fier aux apparences tu sais, je ne suis peut-être pas celle que tu crois.
– Je... je ne sais pas, j'ai la tête dans du coton, je me sens tout bizarre!
– Allez monsieur, dis-moi, des mots comment?
– Je... Je ne peux pas, je n'arrive pas à en former une seule syllabe. Chaque lettre m’échappe, comme si ma langue refusait de se laisser caresser par le moindre mot doux

La petite fille stoppa son jeu et se planta devant moi, et de ses yeux candides me fixa:
– Tu t'échappes... Attends.... Avant de partir... Regarde-moi une dernière fois... Ecoute-moi... Impossible désormais de prononcer des mots d'amour? Ecris-les! Ils seront tous là pour les lire.

A mon réveil, je mis longtemps à reposer pied sur terre. D’ailleurs, avais-je rêvé ? Je ne sais plus, toujours est-il que ce jour là, je pris la plume et écrivis d’une seule traite ma première histoire d'amour. Ce n’est qu’après avoir formé le mot fin au bas de la dernière page que je les vis : trois petits cailloux blanc posés sur mon bureau, juste à côté de l’encrier.