L’homme est grand, jeune, barbu.
Lunettes noires aux yeux,
Il marche dans la rue,
Là, sur le trottoir,
Loin et proche à la fois,
De moi.
D’une main, il tient une canne blanche,
De l’autre, une rose, blanche, elle aussi.
Il marche d’un pas sûr,
Vers je ne sais quoi
Je ne sais qui.
Vers moi?
Le jour s’achève,
L’obscurité commence à poindre,
De ma voiture, je l’aperçois
Et mon regard se fixe,
S’obstine sur lui.
Le feu passe au rouge,
Je m’arrête,
J’allume mes lumières,
Le voilà devant moi qui traverse,
La canne levée,
La rose brandie en lanterne,
Il marche,
Il avance, d’un pas alerte,
Vers je ne sais quoi,
Je ne sais qui.
Le soleil se couche sur la ville,
M’éblouit tout entière,
De ma voiture, je le suis,
Et mon regard se retourne,
S’imprègne de lui.
Le feu passe au vert,
Je démarre,
J’allume mes grands phares,
L’homme, grand, jeune, barbu,
A la canne et rose blanche,
Tel un chef d’œuvre
De peinture,
Se dessine
S’imprime dans mes yeux
Dans ma tête,
Dans mon cœur,
Ne me quitte plus.