Kaléïdoplumes 2 : 2010 / 2013
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| | Entre quatre murs | |
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+5Silhène kz ESCANDELIA Amanda Cassy 9 participants | Auteur | Message |
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Cassy Admin
| Sujet: Entre quatre murs Jeu 2 Mai 2013 - 14:39 | |
| Des couloirs longs, larges, sans fin Des salles de classe, blanches, fades Des salles d'études, grandes, froides Une sonnerie hurlante, stridente
J'ai seize ans, entre quatre murs
Des escaliers de tous les côtés, Pour descendre, vers la sortie, vers la vie Pour monter, dans les étages, dans les dortoirs Du lever au coucher, présence obligatoire
J'ai seize ans, je ne pousse plus
Une cour de béton, quelques centimètres de gazon Un carré de ciel au dessus Trois ou quatre bancs de bois vermoulu Derrière les grilles, la rue
J'ai seize ans, je me flétris d'ennui
Une cantine sans joie, sans âme Des tables alignées, chaises cabossées Carafes en fer blanc,remplies de lait tiède, de café Repas sans saveur, vite expédiés
J'ai seize ans,je ne ris plus
Quarante lit tête bêche, par rangée de huit Quarante couvres lits, rouge vif au plis parfaits Lumière aveuglante, intrusive, agressive Noir total à vingt-deux heures tapantes
J'ai seize ans, j'attends. Quoi? Je ne sais... J'attends Je me souviens de la rue principale que je remontais chaque lundi matin, le coeur gros et le bagage lourd.. Cinq jours et quatre nuits, interminables, m'attendaient au bout de la dernière côte. Et cet impression, une fois passée la porte, que j'entrais dans un trou noir et profond. Alors ma gorge se serrait, et je me sentais au bord de l'abîme.
Je me souviens de ces longues soirées dans la salle d'étude, à attendre que la sonnerie de 21 heures nous donne la permission de monter aux étages, dans les dortoirs. Enfin, une fois débarbouillée, me pelotonner tout au fond de mon lit. Plus que 3 nuits, plus que deux, plus qu'une... Interdiction de courir dans les couloirs, de rire, de parler fort Attendre son tour, pour se doucher, pour se coucher, pour manger Dortoir fermé à clef avant telle heure Salle d'étude fermée à double tour après telle heure
Je me souviens des mercredis après-midi Ces quelques heures de liberté, dans un café, en centre ville Une salle en sous sol, Renaud en boucle sur le juke box "C'est beau la jeunesse, encore faut-il savoir l'utiliser" Laisse béton, en pension, au lycée, ma jeunesse se fane! | |
| | | Amanda Modératrice
| Sujet: Re: Entre quatre murs Jeu 2 Mai 2013 - 16:07 | |
| C'est tout à fait cela, enfin c'était.... J'ose croire que c'est chose révolue !
Atmosphère très bien rendue, flétrissement d'un être en devenir ( attention, danger !)
Je constate que tu as échappé à la pension catho ,avec messe obligatoire tous les matins, prières du soir et confessions hebdomadaires ( avec invention de péché)... C'est déjà cela ! Mais cela marque un être à tout jamais ! | |
| | | ESCANDELIA Kalé'reporter
| Sujet: Re: Entre quatre murs Jeu 2 Mai 2013 - 17:51 | |
| complètement d'accord avec vous les filles ! on appelait le pensionnat la prison et c'en était une. J'ai eu droit aussi pour 15 jours interminables à ce supplice infernal. Cassy, tu dépeins avec beaucoup de fidélité ce que nous avons pu endurer, nous les générations pension. | |
| | | kz Kalé'reporter
| Sujet: Re: Entre quatre murs Jeu 2 Mai 2013 - 20:54 | |
| Très beau texte qui dit avec des mots justes la souffrance de nombre d'enfants lorsqu’ils sont en pension. Je garde malgré tout aussi le souvenir de moments franchement heureux, toujours liés au fait que nous étions entre enfants du même âge. Lorsqu'on est ado, cela compte. Nous ne sommes pas égaux devant la pension. Certains y étouffent, d'autres s'y déploient. En tout cas un texte de toute beauté ! | |
| | | Silhène Maîtrise le sujet
| Sujet: Re: Entre quatre murs Jeu 2 Mai 2013 - 21:35 | |
| Ton texte me fait froid dans le dos, il raconte avec tellement de justesse tout ce que le mot "pension" peut donner de pire. Ce manque total de liberté, cette vie réglée comme du papier à musique. Et la lente extinction d'une énergie en devenir, l'étouffement d'une vie. Dur mais passionnant à lire | |
| | | sol-eille Maîtrise le sujet
| Sujet: Re: Entre quatre murs Ven 3 Mai 2013 - 16:04 | |
| j'ai connu la pension aussi mais je m'y sentais bien contrairement à toi et je ne comptais pas les nuits, sauf pour les quelques heures de liberté du mercredi après-midi, avec le juke box et Renaud aussi !!!
mais je comprends tout à fait ton sentiment, ce sentiment d'être écorchée vive... et c'est un passé vers lequel je n'ai pas envie de me pencher... peut-être qu'inconsciemment je n'étais pas si bien que cela !!!?!?!! | |
| | | Nerwen Modératrice
| Sujet: Re: Entre quatre murs Ven 3 Mai 2013 - 18:34 | |
| Un texte poignant qui dit les affres de l'enfermement qui étouffe et freine tout épanouissement. C'est très beau | |
| | | catsoniou Kalé'reporter
| Sujet: Re: Entre quatre murs Sam 4 Mai 2013 - 18:50 | |
| - Citation :
- J'ai seize ans, je ne pousse plus
Ah ? A ce point, le pensionnat, ça ressemblait à un bagne pour adolescent(e)s coupables de je ne sais quel méfait. Pas étonnant qu'en 68 , les jeunes étudiants aient eu soif de changement ! Très bonne description | |
| | | ESCANDELIA Kalé'reporter
| Sujet: Re: Entre quatre murs Sam 4 Mai 2013 - 20:17 | |
| - Citation :
- ça ressemblait à un bagne pour adolescent(e)s
Oui, oui, je confirme. La directrice du mien, de pensionnat, était tellement sadique qu'elle traumarisa plus d'une génération. Je vous donnerais 2 exemples, comme ça pour démontrer à quel point cela est vrai : Elle avait à son doigt une bague du plus bel effet, avec un diamant et des reliefs sculptés. elle ne se privait pas de distribuer outre les 500 lignes avec un crayon de chaque couleur, ( qui avec l'inflation, en fin de scolarité était arrivé à 5 000), force claque avec sa bague retournée à l'intérieur de sa main qu'elle avait très lourde, la garce ! Autre exemple, je me souviens d'une camarade qui venait de perdre sa maman. Elle avait dans les 13 ou 14 ans. Elle fut punie pour je ne sais plus quel motif (il y en avait tellement ) notre chère directrice ne trouva rien de mieux que de lui infliger le supplice suivant : apprendre par coeur un poème intitulé : "heureux ceux qui sont morts" Je ne peux pas vous dire dans quel état se trouvait ma camarade, je n'étais pas dans sa peau, mais moi, je fus choquée, au point d'y penser encore près de cinquante ans plus tard ! Et toujours le même cauchemar. | |
| | | Noufloca Occupe le terrain
| Sujet: Re: Entre quatre murs Dim 5 Mai 2013 - 10:56 | |
| En lisant le texte et vos commentaires, je sens comme des frissons ; je n'ai jamais été "internée" dans l'internat, juste élève dans un établissement catho et cela m'a suffit pour comprendre tout ce qui est décrit ! Cette directrice à grosse bague a-t-elle un jour eu des comptes à rendre pour toutes ses méchancetés ? Je l'espère ! | |
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| Sujet: Re: Entre quatre murs | |
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| | | | Entre quatre murs | |
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