Ludivine

Kalé'reporter

Dans mon jardin secret, s'ouvre une parenthèse qui, parmi l'amoncellement des souvenirs, restera un moment de pur bonheur.

Au bord de l'allée, annonciateurs, les lys s'épanouissent, les coquelicots résistent, bousculés par les œillets et les premières roses blanches éclosent timides. Ils s'apprêtent à saluer son passage: Ludivine arrive vendredi.

Devant elle, me voilà poupée de son : ma petite-fille possède le don d' annihiler toute ma volonté. Elle le sait, la mâtine... Toute petite déjà, levant vers moi sa jolie frimousse encadrée d'une chevelure noire de jais, elle me conduisait à son gré, voir poules et canards, cueillir fraises et cerises avant leur maturité, au grand dam de notre chère et tendre épouse et mamie. Ou encore il convenait de lire, relire et commenter pour la énième fois son livre d'images. Plus tard, elle fit de moi son élève patient quand lui prenait l'envie de jouer à la maitresse d'école.

Du haut de tes quinze ans, Ludivine, exigeras-tu du papy qu'il se conforme à tes caprices, l'incluant toutefois, pour son plus grand bonheur dans tes pérégrinations ou l'ignoreras-tu, limitant son intervention à te préparer tarte aux fraises ou clafoutis, ou te conduire ici et là, en particulier à flâner tout au long des boutiques de la cité gaillarde ?

Peut-être poursuivras-tu mon initiation au maniement de cette étrange machine qui tient dans le creux de la main et que vous n'avez de cesse de coller à votre oreille comme les coquillages du temps de mon enfance où l'on croyait entendre la mer...

Sans doute, experte dans l'art du cheminement au travers des arcanes du Web, comme un aveugle à qui on prend le bras pour lui aider à traverser la route, sauras-tu me guider efficacement sur les voies d'Internet.

Et j'apposerai en bonne place un autocollant indiquant que me v'là promu accompagnateur d'une future as du volant, et nous sillonnerons les petites routes quercynoises et limousines...

Le samedi soir, sous les spots de la piste de danse, tu tenteras de m'apprendre les bienfaits de la zumba et je t'initierais au madison, à virevolter au son de l'accordéon.

Je resterai à l'écart de tes conversations avec mamie quand, mutuellement, vous vous confierez des secrets de femmes que les hommes n'ont pas à connaître...

Puis, la parenthèse se refermera...

Elle se refermera sur un rêve impossible. Sad

Ludivine n'existe qu'à travers ces quelques lignes où s'épanche mon, notre regret de ne pouvoir dispenser à des petits-enfants notre trop-plein d'affection.

Admin

La fin de ton texte me laisse sans voix. Je m'y attendais si peu!
Je ne sais quoi écrire d'autre!!!
Je me suis laissée entraîner dans le sillage de Ludivine, l'imaginant marchant dans ton allée, à tes côtés...
C'était une parenthèse, inattendue pour toi, pleine d'émotion pour le lecteur! bravo!

Kalé'reporter

Belle façon de sublimer cette souffrance que de s'autoriser à écrire à son sujet un texte qu'aucun grand-père n'écrirait mieux que ce que tu as écrit ! salut bas

Kalé'reporter

Belle façon de sublimer cette souffrance que de s'autoriser à écrire à son sujet un texte qu'aucun grand-père n'écrirait mieux que ce que tu as écrit ! salut bas

Modératrice

Je ne suis pas dans le secret des dieux, mais ce secret-là, Cats, tu me l'avais un jour confié...

Alors en lisant ton texte, je me suis interrogée :ma mémoire me jouerait-elle des tours ? Ai-je confondu Cats avec un autre ?

Ce texte parle tellement vrai, du début ( magnifique photo, comme un arc de bienvenue) à la fin, jusque dans les moindres petits détails, que je crus m'être trompée.

Et lorsque la chute arriva, je suis brutalement retombée sur terre.

Et je me dis que tu as certainement passé beaucoup de temps à observer les jeunes autour de toi et à rêver cette parenthèse.

Finement décrite, cette Ludivine, tu l'as rêvée ou tu en as un spécimen dans ton entourage ? Peu importe, ton texte est magnifique:flower:

**Maîtrise le sujet**

Qui ne rêverait pas d'avoir un papy comme toi ?

C'est magnifique, Cats, j'ai vraiment vu évoluer Ludivine, et puis elle s'est évaporée, comme un rêve au réveil.
Sa présence est tangible ; comme tu as du en passer des heures à l'imaginer...

salut bas

**Maîtrise le sujet**

Un texte splendide.
Je me suis moi aussi complètement laissée emportée par cette si belle complicité avant la chute... bravo

Kalé'reporter

Ce regret nous rend parfois mélancolique, mais dans la vie, il y a tant et tant de belles choses ... cool !

Quant à Ludivine, c'est bien ainsi que j'imagine la petite-fille que nous n'aurons pas . Elle est l'image superposée de petites voisines et autres jeunes adolescentes qu'on rencontre au cours de nos multiples activités ... Et il m'a suffi de mettre bout à bout mes observations pour rédiger cette parenthèse.

Merci de vos coms bisou

Occupe le terrain

Ton texte génère deux catégories d’émotions toutes deux très fortes : d’abord, tout au long du texte, l’attendrissement, comme celui du grand-père lui-même devant sa petite fille, à travers une série de scènes très crédibles. Et à la fin, la déception et la tristesse en découvrant qu’il ne s’agit que d’imagination. Un vrai coup de massue, cette fin.

Kalé'reporter

Ludivine, cette blessure ! Bien sûr que cette petite doit te manquer, mais tu sais, quand on voit l'avenir qu'on leur laisse à ces petiots, n'ai donc pas de regret.