L'hirondelle: Tiens tu es encore là ? Je ne savais pas que cela vivait aussi longtemps les grillons !
Le grillon: Tiens ! C'est déjà le printemps ? Je ne pensais pas que je passerais l'hiver !
L'hirondelle : Comment as-tu fait ? Qu'as-tu mangé ? A quelle flamme t'es-tu réchauffé ?
Le grillon: Ai-je mangé ? Oui, je crois. Il y avait encore quelques miettes de biscuits entre les touches du piano. Ada, n'avait pas le droit de manger en jouant, mais elle parvenait toujours à le faire en secret. Savait-elle alors que son insoumission nourrirait mon âme ? Le chocolat avait une saveur rance, mais pour un souvenir c'est bien assez.
A quoi me suis-je chauffée ? Au souvenir des notes je crois. J'ai glissé sur les cordes, enfin celles qui restaient encore un peu tendues. Un peu d'étincelles en a jailli. Cela m'a suffi. Et toi ? Pourquoi es-tu revenu ? Tu ne cessais de dire que cette maison dévastée, abandonnée t'oppressait.
L'hirondelle: Je ne sais pas. Mon instinct m'a guidée. La musique qui flotte ici aussi, peut-être. Si ce qui te tient en vie est la force du souvenir, moi ce qui me pousse est la force des habitudes. Je crois. C'était bien avant qu'ils ne partent tous. Sais-tu pourquoi ils sont partis ?
Le grillon: Oui je sais. Je te l'ai dit déjà une centaine de fois. Pourquoi poses-tu toujours les mêmes questions ?
L'hirondelle: Je me demande si je vais refaire mon nid de nouveau juste au dessus de la fenêtre à l'extérieur ou si je vais profiter du carreau cassé pour entrer.
Le grillon: Je vais finir par croire que tu veux te rapprocher de moi ! C'est dangereux de se faufiler entre ces carreaux cassés. L'ouverture est si étroite !
L'hirondelle: Moi ! Vouloir me rapprocher de toi ! Quelle idée ! Je n'ai pas si faim !