Dire que je me dresse fièrement en attendant l’ordre est peut-être un peu exagéré et pourtant je suis fragile et réagis au moindre souffle d’air. Pour le reste, tout est là, mes camarades par milliers, prêts à s’élancer dans une folle farandole et les caméras qui tournent déjà pour rendre compte d’un évènement annuel très attendu…
Pour l’heure, nous sommes là, petites choses légères et colorées, entassées dans une bourse de soie changeante balancée au poignet délicat d’une marquise d’un autre âge…
L’air est chargé de cris, de rires et de musiques. Une légère odeur de poudre flotte, balayée par le parfum sucré des friandises…
Soudain, une petite main gantée de dentelle ivoire, se glisse par l’ouverture de la bourse et se referme sur nous. Ceux qui n’ont pas la chance d’être saisis glissent entre les doigts: ils devront attendre encore…
Vivement la main se retire, pleine d’une poignée des nôtres et avec un éclat de rire, dans un geste ample et gracieux nous explosons dans la lumière — léger feu d’artifice de papier — pour retomber en pluie multicolore sur les masques en farandole…
Certains, hélas, finiront dans le ruisseau, mais d’autres resteront accrochés, qui sur un col de velours, qui dans une chevelure dorée… Ils seront retrouvés, bien après la fête, petit souvenir joyeux d’une soirée de Carnaval…