Il pourrait tomber au moindre souffle tant il paraît frêle.
Pourtant il se dresse fièrement en attendant l'ordre.
Les caméras sont prêtes à envoyer les images.
Dans quelques secondes, il entraînera des milliers de ses camarades dans une course folle.
Je dois arriver le premier, je ne supporterai pas mon échec. Cette course a tant de succès que nous sommes des milliers.
Course épuisante, débutée il y a quelques secondes, ça pique, c’est noir.
Je me retourne, ils me collent tous, comment vais-je me dégager ? Devant moi ils sont encore nombreux.
Course folle contre la montre, mon corps grêle souffre, je m’essouffle, je m’encourage. Je sais que ce que je vis en direct, est une course suicide. Tous les participants le savent, j’en fais partie. Mais, si j’arrive le premier, alors, je serai fêté, en direct.
Je me nourris un peu, rapidement, sans perdre une seconde.
Nous avons été prévenus certains d’entre nous se perdront avant le passage.
Le passage, premier objectif de cette course folle. Je l’ai franchi dans le noir, c'est gluant ; je suis attaqué ! Par quoi ? Des espèces de toiles d’araignée, qui tente de m’enserrer, m’étouffer.
Ne t’affole pas, ne t’affole pas, continue.
Je n’aime pas la caméra, cet œil qui m’observe, qui nous observe, je n’entends pas les commentaires, Suis-je sourd ?
Je m’épuise, et je double,de plus en plus difficilement, ceux qui me précèdent .
Deux routes, laquelle prendre ? D’instinct je prends celle de gauche, celle du cœur, je verrais bien.
Ils nous avaient prévenus, sorte de course d’orientation.
Quelle montée !
Des concurrents meurent épuisés, pas le temps d’avoir des états d’âme, pas encore le moment.
Je vois l’objectif, enfin.
Quelques brasses, ma tête difforme traîne ce corps qui ondule, léger, il oscille, fatigué, ne flanche pas, ne flanche pas, je lui murmure.
La cible est là et je ne peux perdre de temps à voir si je suis le premier.
Comment vais-je faire, par où vais-je entrer ? Pas le temps, pas le temps d’en faire le tour. D’un dernier effort dont je ne me sentais pas capable, je plonge la tête la première, et ?
Je hurle, je suis SEUL, j’ai gagné.
Rapidement, je monte une barrière, on ne sait jamais ; et là, dans un bonheur extrême, épuisé, enfin je fusionne avec celle avec qui je vais faire qu’une.
Oui, pour une fois le féminin l’emporte sur le masculin, mais, juste pour ce mot, la première cellule.
La caméra nous regarde, non me regarde, je refuse de donner une interview. J’aurais le temps d’être suivi, filmé, en direct, en différé.
Je vais me reposer après cette course folle, dangereuse, cruelle, mais cela en valait la peine, j’ai neuf mois pour me faire dorloter.