Je n’aimais pas être traitée d’oie blanche quand j’étais jeune adolescente.
Cela insinuait que je ne savais rien de rien concernant les garçons, l’amour et le sexe et cela me vexait honteusement. Car à mon avis, je savais tout.
J’avais tant échangé, comparé et acquis des connaissances avec les autres oies blanches de la classe pendant la récré que je me croyais au dessus de tout soupçon d’innocence.
Certaines plus imaginatives que les autres avaient de plus l’art d’inventer, "sur la première fois ", des histoires abracadabradantesques auxquelles , avec ma naïveté ou bonne volonté naturelle je tentais de croire fermement mais qui me donnaient des terribles grosses terreurs nocturnes .
J’en étais finalement arrivée à la conclusion que non seulement, j’en savais assez sur le sujet et que de plus, ce n’est pas comme cela que les choses se passeraient avec moi. J’avais ma petite idée sur la question du où, quand et comment.
Je n’étais pas une oie blanche comme les autres. Je me sentais appelée à un destin particulier, d’oie plus sauvage...
Car moi, je voulais voler libre et haut et surtout plus haut que tous ces discours de bas étages de bourgeois.
Ce qui m’intéressait, c’était le septième ciel. C’est vers lui que je voulais m’élancer tous bras et jambes déployés… Mais où se situait-il ?
J’étais prête pour cela à planter là mes copines qui elles, s’en tenaient à la satisfaction bassement matérielle d’instincts naturels de terriens alors que moi je désirais ardemment m’élever dans des sphères nettement plus spirituelles et jubilatoires .
A mes risques… périls… et surtout moqueries en tout genre.
Mes fausses amies s’en donnaient à chœur joie à jacasser dans la basse cour derrière mon dos.
Mes ailes en ont pris un sacré coup.
Depuis, j’ai changé de cap mais pas beaucoup : je vole toujours, seulement un peu moins loin, un peu moins haut…
Cela tombe bien parce qu’avec le temps, j’ai attrapé le mal du pays et le vertige.