Faut pas me la faire à moi, en matière de messages, je suis blindé … Des centaines , des milliers que j'en ai délivrés en trente ans de distribution postale. Oui, humblement, j'étais homme de lettres : je les portais à domicile, les missives. Bonnes ou mauvaises, anodines et singulières, à l'initiative du percepteur comme de la petite amie, confirmation de votre commande expédiée incessamment sous peu, ou annonçant la désolation du fournisseur en raison de l'épuisement du stock, impartial, je ne faisais pas la différence , en fonctionnaire assermenté , imbu de l'importance de sa mission.
Finie, cette époque bénie, je ne suis plus qu'un porteur de papier au kilo, dont la plus grande partie garnit directement la poubelle, à moins que pratique (!) les pubs multicolores servent d'emballage à de vulgaires épluchures de légumes .
Quant aux belles enveloppes couvertes d'une écriture bien calligraphiée ou d'une irrégularité caractéristique, elles ne sont plus que l'exception qui confirme la règle : on n'attend plus le facteur comme le Messie , mais on surveille sa boite de réception dans l'attente du « nouveau message » vous annonçant ceci ou cela, excusez-moi de la trivialité , des c... la plupart du temps.
Au risque de passer pour un ringard ronchon, je me prends à regretter les années 70-80 quand, à l'approche du 1er janvier, des liasses de lettres innombrables aux formats diversifiés couvertes d'adresses manuscrites encombraient les tables d'ouverture des bureaux de poste, occupant les facteurs pour un tri général et un coupage précédant le classement final du courrier qui serait distribué à domicile des usagers attendant les vœux des amis, cousins plus ou moins éloignés avant de s'empresser d'y apporter la réponse qui convenait . Distribution de cartes de bonne année entrecoupée de la distribution du calendrier qui vous vaudrait la traditionnelle étrenne.
Oui, je sais ! Il faut qu'au plus vite, je débarrasse le plancher, la Poste, SA au capital affichant fièrement l'alignement de ses zéros, n'ayant que faire des ces vestiges de l'ère des PTT. Contradiction : difficile d'expulser ce « vieux » de 55 ans, faut maintenant aller jusqu'à 60, voire plus ! Quoique … Renault a bien trouvé comment filer au rencart la génération du baby-boom . En fait, quand il s'agit de dégraisser, les idées sont foison dans les cerveaux directionnels !
Alors, rongeant mon frein, j'attends le jour où je laisserais à terre ma sacoche pour m'installer comme tant d'autres devant mon écran et je sauterais de joie , quand, imperturbable, mon PC m'annoncera « vous avez un nouveau message »...