Visites absurdes.
50 ans d'ennui dans la mort, franchement, c'est absurde.
Heureusement qu'ici il n'y a pas de nature, car, vous vous en doutez, je déteste les arbres.
N'ayant pas trouvé le sens de la vie, me voilà condamné à essayer de trouver le sens de la mort.
Dégagé de toute lourdeur corporelle, j'ai pu rendre visite à Sisyphe, je voulais vérifier si ce type était vraiment heureux, comme je l'avais affirmé dans un de mes bouquins. Plantage total de ma part. À rouler son rocher, il s'ennuie à mourir. Enfin, quand je dis à mourir... C'est une façon de parler...
Passant par le quartier des dieux, j'en ai profité pour leur rendre visite. N'ayant pas trouvé de réponses humaines, - et j'ai d'ailleurs toujours affirmé qu'il n'y en avait pas - , je me suis demandé si Zeus et la compagnie créole avait trouvé des raisons d'exister en tant que Dieux. Eh bien je vais vous dire, chez les dieux, c'est pire que tout ce que l'on a raconté dans les mythologies. J'ai même rencontré le Dieu des chrétiens, tenez-vous bien : il ne croit pas en Lui ! Il trouve véritablement absurde d'avoir créé l'homme dans une sorte de lubie frénétique, lorsqu'il voit ce qu'il en est advenu au cours des millions d'années...
Je l'ai même entendu me dire : si c'était à refaire, je ne m'engendrerais même pas...
Là, je me suis dit, mon brave Albert, tu viens de marquer un point !
Autorisé à redescendre sur terre pour y examiner la condition humaine, je n'ai pas été déçu. La peste continue à se propager, les rats politiques français à s'entre-déchirer. Quant à l'étranger, on continue froidement à l'éliminer, et un certain ministre français a quelque chose d'un Meursault light.
Il y aurait de quoi continuer à se révolter post-mortem. J'ai toutefois trouvé un unique humain qui a fait ma réjouissance, en la personne de Robert Badinter par qui la peine de mort fut abolie en France. Ce n'est donc peut-être pas en vain, ni de manière totalement absurde, que j'aurais écrit mes réflexions sur la guillotine.
Je vous laisse, il faut que j'aille convaincre ma fille de s'opposer à mon transfert au Panthéon.
Décidément, les femmes...