Tu es parti en sautillant...

Tu es parti en sautillant...
Sautiller après avoir vu en direct la chute de Ceaucescu, était-ce bien raisonnable ?

Tu es parti en sautillant...
Et puis la détonation a retenti.

Non ce n'était pas à la télé.
Non ce n'était pas la balle qui venait d'exécuter Ceaucescu.
C'était ton dernier sautillement...

Tu es parti en sautillant
Et tu as tiré...

Fin de Ceaucescu.
Mort d'Arnaud.
Deux dates irrémédiablement liées.

Tu es parti sans un mot.
Juste un geste, tu sautillais...
Dernier pied de nez à la vie.
Dernière acrobatie du clown.

Tu es parti sans un mot.
Pas de lettre.
Pas d'indice.
Juste une balle.

Fin de ta vie.
Début de mes questions.

Tu es parti en sautillant...
En nous laissant tous derrière toi
Tes parents, ta famille
Tes amis, ton amie

Tu es parti en sautillant
En nous emmenant tous avec toi
Ta mère te berce encore dans ses rêves
Ton père t'aide à faire du vélo sans les petites roues
Je t'explique un texte
Tu me bats au tennis

Tu es parti en sautillant
Et nous nous sommes restés
Immobiles, étourdis, hagards

Tu es parti en sautillant
Nos routes se sont séparées

Ta famille a continué cahin caha
Tes amis ont avancé
Un travail, un amour, un enfant

Tu es parti en sautillant...
Mais certains matins je te cherche encore
Au détour du chemin.

Combien de temps encore ?

Pourquoi ce texte?
Parce que ça fait longtemps qu'il attendait et que sans marathon il ne serait peut-être pas encore né...

Et je pense qu'il était temps de le publier, pour mieux faire ton deuil sans doute !
Très émouvant, Madeleine

Ce texte m'a aussi beaucoup frappée.

"En sautillant"..je n'arrive pas à intégrer ce verbe sautiller, plutôt joyeux pour moi, avec le contenu de ton poème. Dis moi pourquoi ..?

Je suis contente d'avoir lu ce texte,
puisse-t-il avoir un instant soulagé ta peine.

tortue legere a écrit:

"En sautillant"..je n'arrive pas à intégrer ce verbe sautiller, plutôt joyeux pour moi, avec le contenu de ton poème. Dis moi pourquoi ..?

Sans doute parce que le contraste est violent...
Mais la réalité est parfois aussi violente: on peut sautiller en faisant l'imbécile juste avant d'appuyer sur la détente...

Hum, c'est terrible tout cela. Mais je trouve que quand un ami décide de quitter la vie de lui même, on n'y comprend rien. Qui comprend l'autre ?
Oui, l'écrire, bravo.