L’œil du peintre, ce haïku du poète

Elle peignait. Toujours à la peinture à l’eau, diluant fortement les couleurs. Toujours debout.

Elle allait vite. De temps en temps elle s’écartait en arrière. Un coup d’œil incisif vers le paysage, un coup sur sa toile et la voila repartie.

Sa main était rapide et précise. Pas d’hésitations, pas de retouches.

Pas question non plus de la déranger. Elle nous priait fermement d’aller jouer un peu plus loin. Ce n’est que lorsqu’elle rangeait ses pinceaux et sa palette de couleurs que nous pouvions voir sa peinture séchant sur le chevalet.

Rarement le paysage dans son ensemble qui s’étalait devant nous. La plupart du temps elle avait isolé un élément qu’elle avait représenté avec tous ses détails : un acacia au tronc tordu penché sur le toit d’une ferme, la façade d’une maison et son escalier extérieur en bois, le reflet des arbres dans l’eau…

De son œil d’artiste elle nous apprenait à regarder autrement. A chercher l’insolite, la particularité, le détail qui fait qu’un paysage est à la fois identique et différent pour chacun.

NB : consigne un peu détournée mais en toute connaissance de cause

La question qui me vient, c'est est-ce que c'est une personne imaginaire ou bien tu la connais?
En te lisant on a l'impression que tu connais parfaitement ton sujet!
très beau texte . bravo!

Cassy, je parle ici de ma mère qui peignait.

Ça texte en est d'autant plus intéressant. As-tu des toiles? Peux être pourrais-tu en photographier une ou deux et nous les poster ici?

Une consigne au goût du souvenir pour toi Sherkane ! Et un bien joli texte.

Je suis comme Cassy j'aimerai voir quelques toiles

Peindre c'est comme tu dis voir autrement.Si c'est pour reproduire le réel autant prendre une photo.

Elle peignait, tu écris.
Un bel hommage que tu lui rends là

charlotte et silhène ont dit à elles deux ce que je pensais t'écrire... je vais donc me contenter de souligner la forte émotion que ton texte a fait naître en moi.

édit : je viens de lire les comms. c'est donc ta mère, la peintre... je rejoins les autres, je serais curieuse de voir comment elle peignait, une façon de mettre tes mots en image, en quelque sorte...

J'ai de suite compris qu'il y avait des mots de connaisseurs dans ce texte, et la réponse que c'est ta mère est confirmée.
Quel touchant témoignage si bien exprimé.

A lire le texte, on voit cette femme peignant avec rigueur tout en prodiguant à ses enfants de judicieux conseils pour mieux voir ce qui les entoure ...

Très bel hommage !

J'adhère totalement à tes deux phrases finales !
Ainsi qu'aux autres comm'

Le voyeurisme du peintre : c'est du vécu pour toi ! c'est encore mieux ! et cela se ressent dans la description que tu en fais, à savoir pas forcément fidèle à l'image que toi tu te faisais du paysage final qui aurait dû être couché sur la toile ! superbe !

Sans doute t'a t-elle appris à regarder.... J'aime bien cette correspondance avec le haiku.

blanc sur blanc -
une fillette ne reprendra
jamais plus le pinceau

Tu as eu beaucoup de chance d'avoir une maman artiste qui vous "apprenait à regarder autrement. A chercher l’insolite, la particularité, le détail qui fait qu’un paysage est à la fois identique et différent pour chacun."
C'est une belle leçon de vie...

L'une peignait, l'autre écrit, et j'ai l'impression que le regard porté sur les choses, ce regard aiguisé sur les détails de la vie, se ressemble de l'une à l'autre.