Une journée unique

Modératrice

Dimanche 5 février 2012

7h .30: Quand j’ouvre les volets, tout est blanc ! Blanc de neige ! Pour une fois la météo ne s’était pas trompée ! Et pourtant il est assez inhabituel que nous ayons un tel temps dans la région.
Oh, n’allez pas imaginer que les congères accumulées par le vent dans la nuit atteignent le rebord des fenêtres, non, loin de là, mais la couche me paraît avoisiner les six ou sept centimètres. Juste assez pour qu’ici, cesse toute activité contrôlée. Et pourtant que la campagne est belle sous ce manteau immaculé !
Ce qui frappe, c’est le silence, le « grand silence blanc » du poète… Rien ne bouge, seuls quelques corbeaux aventureux, mais tout aussi surpris que moi, coassent leur indignation en traversant le ciel bas et blanc qui se confond avec les collines alentours.
Le thermomètre affiche - 6°, la neige va tenir…

7h.45 : le réveil sonne dans la chambre des enfants et comme s’ils avaient senti un je-ne-sais-quoi dans l’atmosphère feutrée, ils se précipitent vers moi qui suis restée en contemplation devant le merveilleux paysage…
« Il neige, il neige ! » En effet, de légers flocons recommencent à tomber…
« Quel dommage que papa ne soit pas là ! Tu crois qu’il y a de la neige à La Rochelle ?»
Je réalise tout à coup que l’homme de la maison est en déplacement pour son travail et que je suis seule avec les trois bambins qu’il va me falloir conduire à l’arrêt du bus. Car, n’est-ce-pas, pas question de manquer l’école, même pour cause de neige…

8h : Les enfants déjeunent, excités comme des puces à la perspective de belles batailles de boules de neige.
Le téléphone sonne…
« Allo ?........... Ah bon !................ Et jusqu’à quand ? Vous me rappellerez ? …………. Bien, merci ! »
Explosion de joie en cuisine : le ramassage scolaire est interrompu jusqu’à nouvel ordre par décision du Maire.
Problème de la matinée : aucun des quatre robinets de la maison ne daigne nous octroyer la moindre goutte d’eau : les canalisations extérieures ont gelées dans la nuit. Les filles suggèrent d’utiliser ma lotion démaquillante pour une toilette de chat…

9h : pendant que les enfants enfilent à la hâte, gros pulls, anoraks, bottes, gants, bonnets pour affronter une matinée de jeux d’autant plus excitants qu’ils sont rares, j’entreprends de dégager l’allée principale pour me permettre d’aller jusqu’au portail. Pelleter la neige par -6°C, en voilà un exercice vivifiant, mais qui tourne vite à la galère quand il faut d’abord repérer puis dégager à la main la neige accumulée sur la pelle, jetée à la va-vite après sa dernière utilisation par un jardinier peu scrupuleux de ses outils. Mon fils propose de m’aider, mais je vois bien qu’il a plutôt envie de rejoindre ses sœurs dans le pré où elles ont entrepris l’édification du plus GRAND bonhomme de neige du monde ! Minette, notre chatte tigrée, m’a rejointe et m’observe tranquillement. Quand elle en a assez, elle s’éloigne, imprimant dans la neige ses empreintes caractéristiques qui se mêlent aux pas étoilés des oiseaux…

10h : Quand je rentre après une bonne heure de travail, je ne sens plus mes mains, ni mes pieds. Je me prépare une bonne tasse de thé avec un fond d’eau minérale et mon moral remonte au beau fixe en écoutant les cris de joie des enfants dehors. Je suis même capable de répondre à mon mari que tout va bien : « Je gère ! » lui dis-je quand il m’appelle, un peu inquiet.
Le coup de téléphone suivant vient de la Mairie qui s’enquiert de mes éventuels besoins. « Je n’ai pas d’eau !
—Les agents municipaux sont en train de distribuer des packs d’eau minérale, mais soyez patiente, les routes sont enneigées. » Pas possible ?
Les appels se succèdent, la plupart des amis dans les fermes voisines sont dans la même situation que moi, mais comme ils savent mon mari absent, la solidarité joue à plein et chacun propose son aide. Je les remercie tous mais répète « Tout va bien, je gère ! Les enfants sont ravis, je les entends qui m’appellent pour admirer leur bonhomme… Oui, oui, je fais des photos… »

13h : Après un déjeuner revigorant, les enfants font montre de moins d’enthousiasme pour ressortir. La cadette qui a perdu un gant dans la neige se plaint que les mains lui brûlent. La télé diffuse les actualités régionales et nous constatons que bon nombre de régions sont logées à la même enseigne, voire bien pire. Je propose un après-midi crêpes et jeux de société qui est adopté avec enthousiasme.

18h : Malgré toute cette blancheur, je jour tombe assez vite et quand j’allume l’électricité, je note tout de suite une certaine baisse d’’intensité qui se transforme bientôt en plus d’intensité du tout : c’est la panne ! Surtension ou défaillance des lignes électriques à cause du poids de la neige ? Le résultat est le même… La chaudière à allumage électrique ne tarde pas à s’éteindre et le spectre d’une nuit dans le noir et le froid surgit devant mes yeux… Pas la peine d’inquiéter les enfants puisque depuis ce matin je me répète en boucle « je gère ! »
Nous profitons d’un restant de grisaille pour partir en chasse de toutes les lampes de poche de la maison. Le moindre bout de bougie, déniché au fond d’un tiroir est rapporté comme un trophée et allumé religieusement. Les verres sur le vaisselier miroitent de mille feux et la cuisine prend des allures de caverne d’Ali Baba…

20h : Un dîner aux chandelles ! Autour de la table, dans le halo de lumière chiche, nous mangeons des crêpes, encore des crêpes, au sucre, à la confiture, au miel… Je crois bien avoir ingurgité assez de crêpes jusqu’à la prochaine Chandeleur !
La lueur des bougies incite les enfants à parler à voix basse, discours entrecoupé de petits cris de surprise quand Minette se frotte malicieusement contre un mollet. « Elle y voit dans le noir, la veinarde » dit mon fils.

21h : Un dernier coup de fil de mon mari qui se veut rassurant : « Pas d’inquiétude, je serai là demain dans la matinée. Tenez bon ! » Je lui passe les enfants qui se disputent pour lui raconter notre « super journée » de naufragés des neiges.

21h 30 : Pour la nuit je propose de « camper » dans ma chambre. Nous accumulons duvets et couettes pour former une sorte de tente où nous nous blottissons tous en gloussant de plaisir. Les lampes de poche sont à portée de main. Minette nous rejoint en ronronnant et se love sur mes pieds : super bouillotte que les enfants partageront tour à tour…
Ma cadette à demi morte de sommeil, toute tiède entre mes bras, chuchote « Tu nous racontes une histoire, maman ? » Les deux autres m’encouragent « Oui ! S’il te plaît ! »
Alors, serrés les uns contre les autres dans notre igloo de fortune, je commence ainsi :
« Le soir, le petit Kay, à moitié déshabillé, grimpa sur une chaise près de la fenêtre et regarda par le trou d'observation. Quelques flocons de neige tombaient au-dehors et l'un de ceux-ci, le plus grand, atterrit sur le rebord d'une des caisses de fleurs. Ce flocon grandit peu à peu et finit par devenir une dame vêtue du plus fin voile blanc fait de millions de flocons en forme d'étoiles. Elle était belle, si belle, faite de glace aveuglante et scintillante et cependant vivante. Ses yeux étincelaient comme deux étoiles… »*

*La Reine des Neiges (Andersen)

**Maîtrise le sujet**

un souvenir inoubliable pour tes enfants !!!
génial !!! (à court terme... c'est sûr que si ça a duré 15 jours c'est moins drôle !)

**Maîtrise le sujet**

Je suis en attendrissement devant une mère qui gère si bien une situation difficile.

Invité

Ah que j'aime le campement dans la chambre à coucher ! Que de souvenirs pour moi ! Quand mes garçons étaient bambins, les dimanches matin d'hiver, c'était la fête. Tous blottis dans le grand lit, on jouait à "on dirait qu'on est..."
Tu as très bien raconté cette journée riche en évenements Nerwen. salut bas

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