Tempo

Malhabilement, mes mains farfouillaient dans la veille caisse.
Cette vieille caisse qu'on avait déménagé cent fois et que mes pauvres os ne pourraient
même plus soulever d'un centimètre.
Ah ma vieille caisse chérie. Au fil des années on t'avait empiffré comme une oie,
de nos plus beaux souvenirs, jusqu'à ce que tu en sois gavé. Et maintenant. Bien des années après.
Maintenant que je ne peux plus voir ce que tu as à me donner. Que mes yeux sont trop fatigués.
Tu me vomis tout ce bonheur passé.
Ma main s'arrêta sur l'objet dur. De loin, c'était mon préféré. Cela faisait des années que je n'avais pas
caressé ce cuir rugueux.
Égratigné parci, parlà de rainures affligées par je ne sais quelle blessure. Je sentais encore les sillons
graveleux sous mon derme fin vieillissant. A tâtons, le petit pavé s'entrouvrait délicieusement pour
découvrir cette ellipse de faible dimension et laissait échapper un nuage de poussière qui me chatouilla les
narines.
Pas plus grand que la paume de la main, je flattais le métal froid et lisse du bout du doigt.
Essayais d'y déchiffrer ces quelques lettres qu'on y avait gravé jadis. Nos lettres, nos secrets, nos bonheur.
Avec émotion, j'approchai la petite chose ovoide et plate de mon oreille.
Et j'activai la petite vis qui se dressait fièrement au sommet. Presque comme par magie, elle reprit vie et cajola mon tympan de ce tempo régulier qui nous berçait jadis.
D'un clic, je pu scinder l'oeuf chantant, et y glisser mes phalanges. Autrefois, le papier de la partie
supérieure était glacé. Mais après toutes ces années au contact du verre qu'il cotoyait étroitement,
il était devenu rêche. Je ne voyais malheureusement plus mais j'imaginais la photo qui s'y trouvait autrefois. S'en était même plus jouissif encore de l'imaginer que de la voir. La ré-inventer.
Les souvenirs s'emparaient de moi comme un frisson glissant sur mes rides.
Evidemment, ils n'y verraient, eux, aux yeux vifs et pétillant de jeunesse, qu'un petit objet qui me rappellerait vaguement à eux. Mais moi, j'en sais une histoire longue de cinquante ans de bonheur.

Un texte très émouvant et j'aime beaucoup les descriptions techniques et émotionnelles.

Citation :

D'un clic, je pu scinder l'oeuf chantant,

Ma perspicacité est prise en défaut !
Qu'es-à co ?

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snif c'était peut-être trop imagé pour que vous trouviez: mon objet était la montre gousset.

J'y avais un peu pensé…
Mais à cause de l'évocation du cuir j'avais abandonné l'idée de la montre

Le cuir ? Tu évoques Une sorte de petite bourse qui contiendrait la montre ?

Oui c'est ça alainx, la plupart des montres sont conservées dans de petits coffrets à bijoux en cuir si elle ne sont pas utilisées pour éviter d'être rayé, enfin c'était le cas de celle ci en tout cas