Maria est assise sur le balcon de son petit appartement, le soleil est doux et elle savoure sa caresse en buvant à petites gorgées, un bon café. A l’intérieur tout est propre et calme, le chat dort tranquille, sur le canapé.
Maria aime bien ses moments de quiétude, elle les déguste à petites bouchées pour bien s’en nourrir, pour ne pas oublier que le bonheur peut être simple.
Elle revient de loin Maria. Elle revient d’un monde où tout avait l’apparence de la simplicité et de la tranquillité. Pourtant…
Michel était un homme comme tant d’autres, ni très beau ni très laid, un emploi stable d’agent de maitrise dans une entreprise locale. Il s’intéressait au foot avec ses collègues et à la pêche à la mouche avec quelques amis.
Il s’intéressa à Maria alors qu’elle n’allait pas très bien, elle avait perdu ses parents dans un grave accident de voiture et comme si cela ne suffisait pas, elle avait raté le concours d’entrée à l’école d’infirmière. Il s’était assis à côté d’elle à cette soirée où une amie l’avait trainé en lui disant que cela lui ferait du bien. Il lui avait parlé gentiment, l’avait même faite rire. Ils se sont revus et il a écouté les peines et les doutes de Maria, il lui a parlé de la façon dont il avait surmonté ses problèmes de timidité. Petit à petit, Maria a repris goût à la vie, elle s’est attachée à cet homme tranquille qui était si patient avec elle, qui avait tant de courage et de force en lui.
A la fin de l’année, ils emménageaient ensemble dans la maison dont Michel était propriétaire, Maria avait retenté le concours d’infirmière et cette fois, elle l’avait obtenu.
Elle a commencé sa formation pleine de confiance en la vie qui lui souriait à nouveau, elle ne comprenait pas toujours les petites réflexions acides de Michel sur ses goûts ou sa façon de travailler mais elle pensait que c’était sa façon de l’aider. Après tout, il avait été si patient jusqu’à présent.
Les week-ends se passaient doucement, les repas entre amis et les sorties à la pêche les occupaient pleinement. Maria aurait bien aimé aller de temps au cinéma et recevoir ses copines, Michel n’aimait pas le cinéma et encore moins les copines de Maria. Alors peu à peu, elle renonça à les voir à la maison. Michel était si gentil quand ses amis étaient là, tous les deux formaient un si joli couple qu’elle laissa faire. Les critiques continuaient pourtant, Maria se remit à douter d’elle. Un jour, elle décida d’en parler avec Michel, il l’écouta attentivement puis il sourit. Doucement, il lui expliqua que sa formation lui prenait beaucoup de temps et d’énergie et que c’était sans doute pour cela qu’elle prenait mal toutes ses réflexions. Il lui demanda si elle ne se serait pas trompée de choix professionnel, après tout, elle n’avait réussi le concours que la seconde fois et puis, elle n’avait pas toujours fait les bons choix. Il lui également combien, il était peiné qu’elle ne comprenne pas à quel point, lui Michel, voulait l’aider et la soutenir et il ajouta qu’il lui pardonnait car elle était si fragile…
Maria, s’en voulut de cette conversation, de sa susceptibilité et surtout d’avoir de la peine à un homme si gentil et si bon avec elle et elle encaissa les critiques et les petites remarques désobligeantes, persuadée que c’était pour son bien. Et le travail de sape continua encore et encore, elle réussit sa formation et trouva un poste dans un service de chirurgie pédiatrique. Et ce fut sa chance. Michel commença à critiquer le service de Maria, il critiqua sa façon de s’impliquer dans son travail et la négligence dont elle faisait désormais preuve dans la tenue de la maison mais Maria tint bon. Alors Michel changea d’attitude, il ne critiqua plus le travail de Maria mais il lui fit remarquer à quel point, elle se négligeait, à quel point elle le délaissait lui Michel qui, désormais, la soutenait activement dans la gestion du quotidien. Maria hésita, douta et fit encore des efforts jusqu’au jour où sa chef de service la convoqua.
Maria avait fait une petite erreur dans le compte rendu de sa journée mais surtout, ses collègues avaient fait part de leur difficulté à communiquer avec elle, elles avaient dit ne pas pouvoir lui faire la moindre remarque sans que Maria ne se replie sur elle-même ou ne s’énerve. La chef de service lui demanda si elle avait des problèmes personnels et Maria commença par s’étonner. Mais l’infirmière-cadre en avait vu d’autres et elle était bien décidée à ne pas la laisser repartir ainsi. Alors elle poursuivit son entretien et Maria commença à comprendre à quel point elle s’était enfermée en elle-même, persuadée que toute remarque était faite pour la déstabiliser, persuadée surtout qu’elle n’avait aucune valeur. Elle pleura longuement dans le bureau de sa chef mais en sortant elle avait ouvert les yeux. Le chemin fut long avant de se retrouver au calme dans ce petit appartement mais aujourd’hui Maria sait reconnaitre les monstres velus qui ont l’air si gentils et si bons….
Sujet: Une si belle illusion 
Mer 2 Mai 2012 - 9:33
