Deux hommes, tous deux amoureux des étoiles bien que dans des domaines fort différents, nous ont quittés cet été. Le premier, l’écrivain de science-fiction Ray Bradbury, au mois de juin, et le second l’astronaute Neil Armstrong en août. Celui-ci aura eu une ultime satisfaction que le premier aurait certainement applaudie, je veux parler du succès de la sonde Curiosity qui s’est posée sur Mars le 6 août. On a marché sur la lune et, un jour, l’homme marchera sur Mars…
En ce fameux 21 juillet 1969, quand Neil Armstrong a posé le pied sur le sol lunaire, je me rappelle avoir pensé : « Moi, il y a longtemps que j’ai marché sur la lune… »
En effet, je me souvenais d’un jeu qui avait occupé l’été de mes 12 ans après avoir vu au cinéma "Destination... Lune ! " Ce film sorti au début des années cinquante, un des premiers à atteindre un haut niveau de précision dans les détails techniques, racontait l'histoire du premier voyage sur la lune d’une équipe d’astronautes américains. Le contexte de la guerre froide d’alors fournissait l’argument de départ : à savoir battre les Russes dans la course à la lune.
L'originalité du film tenait au fait qu'il s’attardait sur le côté technique de la mission et sur le magnifique spectacle des paysages lunaires (il avait d’ailleurs reçu un Oscar pour les effets spéciaux et une nomination pour les décors). L’emploi du procédé Technicolor qui n’était pas encore fréquent à l’époque rendait le spectacle encore plus grandiose et réaliste. D’ailleurs la première impression d’un des personnages du film posant le pied sur le sol lunaire "Un sentiment de désolation" sera confirmée par Buzz Aldrin, le deuxième homme à marcher sur la Lune avec Apollo XI, qui, lui, parlera d'"une magnifique désolation".
Ces aspects nous avaient tellement impressionnés, mon frère, mes copains et moi, qu’après avoir reconstitué, au creux d’une dune, un habitacle de fusée avec tous les détails improvisés d’un tableau de bord, nous avons rejoué sans fin les scènes de décollage de la fusée avec le fameux compte à rebours, l’alunissage, l’exploration lunaire et la marche en apesanteur…
Dans l’histoire les calculs démontraient que lors de l'alunissage, la fusée avait consommé beaucoup plus de carburant que prévu et qu’il était impossible pour l’équipage de rentrer sur Terre. Malgré la décision de délester au maximum la fusée de choses inutiles, puis de choses utiles, celle-ci demeurait trop lourde. Un des astronautes proposait alors de rester sur la lune pour permettre à ses camarades de repartir. Avec quelle énergie délestions-nous notre vaisseau en jetant tous les objets que nous avions péniblement entassés quelques heures plus tôt… Dans ce jeu, en tant que fille, j'avais le beau rôle: j’étais toujours celui qui se sacrifiait avec altruisme et courage.
En regardant à la télévision, l’exploit de 1969, outre l’émotion que nous avons tous ressentie, j’ai retrouvé vivants les souvenirs de ce jeu d’enfant et des acteurs que nous étions alors. Merci Monsieur Armstrong !
Il y a longtemps, j’ai marché sur la lune et j’y suis restée…