Epuisée, crevée, morte de chaleur…
Julie s’écroule sur un banc du parc, elle n’en peut plus !
Tout ça pour ça : 1kg de tomates et autant de cerises au marché.
C’est décidé, elle arrête les frais, elle a déjà donné, la ratatouille attendra et le clafoutis aussi.
Ce n’est pas une vie …
Un cachet contre la paresse, cela devrait exister !
Julie n’a qu’une seule envie : rester couchée là sous le soleil, sur ce banc dans ce parc désert à cette heure matinale.
Ils sont tous au boulot, à l’école, à s’agiter, à trimer.
Julie soupire rien que d’y penser : courir, toujours mais après quoi ? Pourquoi ?
Julie s’étire, ça fait remonter le tonus, lui a dit sa prof de gym.
Ah ! La Gym, l’enfer…
Julie a laissé tomber, bien trop dur et puis ces courbatures après !
Comme le vélo, la rando, les abdos , tellement à la mode.
Le dimanche ce parc est à fuir, chacun y galope, écouteurs sur les oreilles, des sourds en puissance , des chutes en perspectives…
Julie se régale, elle se remémore toutes les images de son film préféré « Alexandre le Bienheureux » avec Philippe Noiret.
Alexandre restait au lit pendant des semaines avec un système de cordes pour faire descendre la baguette ou le saucisson. Son chien lui faisait ses courses, lui ramenait le journal…
Quel rêve ! Ah, si seulement elle avait un chien !
Un chien dressé car elle s’en sent bien incapable.
Nonchalamment Julie pique une cerise dans son cabas et mord dedans avec délice !
C’est décidé, elle n’en bougera plus de ce banc, elle y passera la journée.
Elle rêvasse puis s’assoupit légèrement.
Des cris la font sursauter, des enfants se poursuivent en riant, ils jouent à touche-touche sur la pelouse.
Julie s’indigne : « Sales gosses, peuvent pas rester chez eux devant la télé comme les autres ? »
Jamais elle n’en aura de marmots, trop de boulot.
Déjà rien que l’idée d’en faire la fatigue…
Alors, les avoir dans les pattes, les torcher, les nourrir…
Jamais !
Bon, elle a pigé, fini la tranquillité.
Faut qu’elle s’en aille, vers un ailleurs sans cris ni clameurs !
Justement ses ongles ont grand besoin d’une manucure et tant qu’à faire un soin visage n’est jamais superflu avec un massage en sus.
" Merci, Julie, ce sera tout pour aujourd’hui ! Tu peux lâcher la pose ! »
Francine Van Hove, peintre de son état, tire son modèle de sa léthargie.
Il était temps, Julie commençait à sentir venir la crampe.
Après 3h de pose et interdiction de bouger.
Julie sort de l’atelier, tire sur sa blouse, noue ses cheveux à l’aide du vieil élastique qui les maintiennent en place, chaussent ses baskets.
Avec un peu de chance et en courant vite, elle attrapera le bus de 11h, juste à temps pour la sortie des petits de la garderie.
Surtout ne pas oublier de passer chez la concierge.
C’est elle qui garde le chien.