La scène se passe dans les riantes prairies des Champs-Élysées.
En fond sonore un air de lyre.PHIDIAS: Orphée, arrête de jouer le temps d'une clepsydre et viens voir.
ORPHÉE: Quoi?
PHIDIAS: Regarde les humains en admiration devant nos sculptures. Tu les entends? « C'est magnifique! Quel drapé! On croirait qu'elle est vivante.... »
ORPHÉE
(il pousse un profond soupir): Quelle chance tu as... Moi, plus personne ne s'extasie sur ma musique en dehors des habitants des riantes prairies des Champs-Elysées....
PHIDIAS
(il pose une main réconfortante sur l'épaule d'Orphée): C'est vrai... mais toi au moins tu peux continuer à exercer ton art ici alors que moi....
ORPHÉE
(après un long silence): Ça te manque?
PHIDIAS: A un point que tu ne peux pas imaginer... Je donnerais tout pour pouvoir à nouveau arpenter une carrière à la recherche du bloc de marbre parfait. Et retrouver cette excitation lorsqu'il arrivera dans mon atelier... Pouvoir de nouveau tourner inlassablement autour du bloc, le flatter de la main, à la recherche du meilleur angle d'attaque... Le sentir vibrer sous ma paume... Le poids de l'outil dans ma main... Le premier éclat de pierre... Voir la forme s'ébaucher, découvrir le jaillissement de la statue... Les nuits passées dans l'atelier, à la lueur des lampes à huile, à contempler l'œuvre inachevée en cherchant l'inspiration finale... Ce déchirement aussi quand la statue quittait mon atelier, et en même temps cette fierté, immense, devant le produit fini et devant les regards admiratifs des autres hommes. Je regrette même la fatigue provoquée par ce travail...
(il pousse un profond soupir)ORPHÉE
(effleurant légèrement les cordes de sa lyre): Oui, je te comprends... C'est comme si je ne pouvais plus jamais laisser courir mes doigts sur ma lyre... Tiens, Phidias, écoute, écoute-moi. Je vais jouer pour toi... Ce morceau s'appellera « ode au sculpteur ».