Promenade...

Regarde-toi Clara. Tu étais si belle, à 16 ans. Si pleine de fraicheur, de fougue, de vie. C'était il y a si longtemps...
Regarde-toi, Clara. Tes yeux cernés me fixent avec tant de fatigue et de solitude... ta main pend, inerte, sur tes cuisses de satin drapées... abandon. Tu as abandonné tant et tant, pour lui.
Ta musique, ta carrière, ta foi, ton feu intérieur. Reste sous tes doigts l'ombre de ton amour de dingue, tes doigts qui seuls savent déchiffrer l'imbroglio de notes et d'émotions qui roulent sous sa musique sans fin.

Habitée. Vampirisée par un amour si grand, si fou que même la folie ne l'a pas détruit.
Je ne sais pas quel est ton âge, sur cette photo. Tu n'as plus d'âge, tu n'as plus que tes souvenirs, et sa musique.

Pourtant la tienne est si belle, si vaste, elle roule doucement au fond de mon coeur, l'embarque pour une ballade romantique, mélancolie et tristesse se planquent sous les doux accords, sous les trilles et les croches...

ta main inerte a pourtant scandé ces notes que j'écoute, tu as laissé cette même main composer cet air que j'entends et qui m'inspire, lourde chaine sans fin, composition à plusieurs mains, puisque la tienne semble avoir lâché la rampe.
Peut-être se repose-t-elle,d'avoir trop interprété les oeuvres d'une autre main, peut-être a-t-elle cru être moins douée, moins riche de choses à dire ?

ton regard m'émeut, Clara, cette main me fend le coeur. Tu sembles perdue, fragile et seule. Tu t'ennuies, la vie t'ennuie ?
Mais ta musique si belle, si douce m'enchante, comble un coin de mon coeur, se love entre chaque neurone de mon cerveau, et pousse ma main à écrire, tant qu'il y a des notes, il y a des mots...

Merci pour la promenade, Clara...

Je vois que tu connaissais la vie de Clara avant l'exercice, soit avant, soit en lisant le blog et les liens qui en decoulaient, mais je m'en fiche. J'aime beaucoup, beaucoup cette interpretation de la photo.
Je me rend compte que je ne m'etais pas impregnee de la photo vraiment avant de me lancer.
Automatique ou spontanee... j'aime bien ce que les mots ont donne sous ton clavier.

J'avais été, comme toi, attirée par le regard de Clara, que je trouvais cerné. J'ai été cherché d'autres photos, pour voir comment elle était à 16 ans, lorsqu'elle a épousé son prince. C'était le même regard, ces mêmes cernes. Un regard à la fois triste, doux, et, je dirais: vieux (mais ce n'est pas le mot exact!)
Tu t'es plongée dans ce regard pour nous donner un bien beau texte Pati

merci à vous deux

en fait, admin, ce qui m'a le plus attiré l'oeil, c'est pas son regard mais ses mains... mais c'est vrai que c'est la photo qui m'a inspirée, la musique a elle, bercé mes mots.

Une très belle et émouvante promenade Pati.

pati a écrit:

Mais ta musique si belle, si douce m'enchante, comble un coin de mon coeur, se love entre chaque neurone de mon cerveau, et pousse ma main à écrire, tant qu'il y a des notes, il y a des mots...

Magnifique liaison harmonique cet enchainement de notes et de mots

A te lire, Pati et les autres aussi, il semble que Clara n'était pas heureuse.
A nos yeux de lectrices du 21e siècel, sans doute.
Elle se serait donc sacrifiée par amour.
As-tu remarqué que sur les photos anciennes, les femmes n'ont jamais l'air heureuse, elles ne sourient pas ?
Les hommes sont en général plus fiers, tête levée, pleins de certitudes..
Pas les femmes...
J'en ai des vieilles photos eh bien, c'est consternant : même sur les photos de mariage, elles ont l'air d'aller à l'abattoir et l'Homme a le regard triomphant !
Qui saura la vraie Vérité ???

'est vrai ce que tu dis Amanda, sur les vieilles photos, même les photos de mariage, la femme ne sourit jamais; alors que l'homme, souvent, la porte fièrement à son bras.
De la à dire que les femmes allaient à l'abattoir, moi je dirais plutôt sur une chaîne de reproduction

Amanda, j'avais simplement suivi un des liens indique par Adrian sur le blog et ce sont surtout les deux phrases citees plus bas, qui m'avait fait ecrire... 'et pourtant' puis suscite mon deuxieme texte, alors que partout ailleurs on parle de bonheur, voire d'amour parfait.
http://www.coindumusicien.com/Schumann/bonheur.html

Citation :

Plus dur est le sacrifice qu'elle doit faire lorsque Robert compose. Le ménage n'a qu'un piano et Clara doit s'effacer pour laisser la place à son mari. Lorsqu'elle ne peut jouer pendant plusieurs jours de suite, son journal reflète ses inquiétudes quant à sa carrière.

Citation :

Parfois n'y tenant plus, Clara part en tournée. C'est le cas en février 1842, six mois après la naissance de leur premier enfant. Schumann l'accompagne de concert en concert, comme à Hambourg où il lui dit au revoir car sa femme part conquérir Copenhague où elle restera deux mois. Ces tournées, Schumann les détestera toujours. Il a l'impression de n'être aux yeux des auditeurs, que le mari de la virtuose et se sent humilié.

Je ne pense pas que ce soit que nos yeux de lectrices du 21ieme siecle qui nous fassent ecrire ce que nous ne faisons en fait que percevoir. Il est certain qu'il y a eu un lien tres fort entre les deux. Elle etait bien consentante pour mener son propre pere en justice et oser epouser son Robert. Et il lui a parait-il fait decouvrir pleins de choses que son pere a elle avait omis de son education artistique.

Mais au niveau creatif, n'a-t-elle pas souffert de la 'concurrence' maritale comme le suggere ces citations qui proviennent bien de l'histoire?

Un très beau texte comme d'hab' qui semble tout droit inspiré non pas de la musique mais de la photo (les comm me l'ont confirmé) Intéressant cette remarque d'Amanda sur les photos anciennes et l'absence de sourire des femmes....
Après le ressenti de Clara comme malheureuse....je dirais que ça me rappelle ce que nous expliquait mes profs en psycho interculturelle, un brin d'ethnocentrisme qui nous frappe tous...