Mon cher Marx

Sprite
Londres
Avril 2011


Cher Karl,


Tu penses bien que lorsque j'ai vu ton nom sur la liste chez Dialogus je n'ai pas eu une seconde à hésiter pour m'adresser à toi, non pour une affaire de Kapital, ni pour refaire le monde, ni parler prolétariat.

Je te dois une de mes meilleurs phrase dans un de mes essai lors d'un cours sur le Développement du Tiers-Monde:

from Karl Marx to Karma via the Kama Sutra

je traduis

de Karl Marx au Karma en passant par le Kama Sutra

J'avoue que le prof, nous peignant à souhait un futur négatif de ces pays émergeant, n'a pas trop apprécié mon histoire de comment ça pouvait basculer d'un jour au lendemain sous le souffle divin ses prédictions, vu que j'avais bien été témoin de la France dépassant l'Angleterre point de vue développement en moins de deux décennies. Ça devait être un rejeton de la classe bourgeoise, pas bien imprégné des réalités au niveau des pâquerettes. Il se disait pourtant Marxiste comme d'autres adhèrent au Catholicisme.

A ce propos, maintenant que tu as gouté de l'outre-tombe, j'aimerais bien savoir quelles sont tes opinions sur vue: Dieu existe-t-il ou pas? Et toi, as-tu maintenant preuve du contraire ou y crois-tu toujours? On cite ton opium du peuple a tellement de sauces qu'on s'est fait de toi une idée d'un athée ô grâce à Dieu (Nougaro n'était pas dans la liste!) or Google m'assure, (non, j'ai bien dit Google et non Gogol, que veux-tu, on arrête ni progrès ni capitalisme), que tu étais croyant.

Quant à l'outre-tombe, je sais exactement où se trouve ta tombe qui n'est pas passé outre. Et c'est pas à côté d'Engel mais des 'angels' en pierre du cimetière de Highgate, où je l'avais pourtant cherché ta tombe, de long en large des allées bordées de grands tombeaux lugubres vers l'an, voyons voir, ça devait être en 1984. Non, pas le 1984 d'Orwell, mais bien l'année 1984 vraie de vraie.

J'allais une fois par semaine chez une ostéopathe dont le cabinet se trouvait en bas du cimetière et il manquait une barre dans la cloture du périmètre par où je pouvais passer ma bicyclette, suivi de mon corps alors encore mince et leste. Je ne t'y avais pas trouvé.
Or quelques semaines plus tard, m'étant trompée d'heure pour ma session, j'avais du la payer sans recevoir le bénéfice des manipulations de mes vertèbres. Furieuse j'étais, t'imagines, môâ, petite prolétaire exploitée sans stratégie et tactique pour la lutte des classes! Mais toujours armée de mon Journal Intime (que crois-tu, on peut pas tous écrire Persécutions aux mains du Gouvernement Français, mais on est cris tous parfois) je m'étais assise derrière une stèle, ma fidèle bécane posée contre le marbre (c'était peut-être du grès remarque) pour y coucher mes frustrations.

Et là, interrompue à chaque minute par des hommes de toutes nationalités, de toute taille et de tout comportements invitants réponse de 'vous-pouvez-pas-me-foutre-la-paix, nonmêoh! Que veux-tu, à l'époque je pouvais jamais m'asseoir dans l'herbe d'un quelconque parc sans être accostée par John, Dick, Harry et leurs confrères et j'en avais ras la patate. J'étais dans ma période féministe galopant et je rêvais de traverser la nuit des villes comme peut se le permettre plus facilement la gente masculine.

Exaspérée de leur manège, je me suis levée brusquement, j'ai tout remballée en secouant la tête et maugréant sous ma barbe (ah, non, si j'en avais eu une aussi belle que la tienne, ils m'auraient foutu la paix) et en me remettant en selle j'ai jeté un œil sur le devant de la stèle et là, j'y ai vu ton nom!

Ils m'avaient sans doute prise pour une de tes 'fan' mais point ne les avaient attirées mes vertus féminines.

Une heure plus tard, je déballais l'histoire à ma thérapeute. Si tu l'avais entendu rire. On a bien discuté de l'Ego se jour-là et de nos projections et perceptions des évènements périphériques à nos vies.

La réalité dans tous ça? Et bien, j'attends que tu me racontes comment ça se passe maintenant de l'autre coté du rideau.


très anarchimèrement,

Ms Sprite

PS: Au fait, j'ai beaucoup apprécié l'humour d'un de tes voisins de tombe, un certain dentiste qui n'a pour plaque funéraire que celle de son cabinet d'antan: Seulement sur Rendez-vous!

Ayant torchée ma lettre au Karl, je me suis rendu-compte trop tard que ce personnage était archivé. Je n'en aurais donc point réponse, mais je me suis bien amusée à me remémorer ce viel incident. Une chose de moins à écrire dans mes mémoires.

L'image de Sprite assise derrière une stèle, sa fidèle bécane posée contre le marbre (à moins que ce ne soit du grés) en train d'écrire ses frustrations sur son journal intime et assaillie par la gens masculine de tout poil, va faire hurler de rire ce bon vieux Karl. De quoi le faire sortir des archives de Dialogus où il a dû se laisser glisser par ennui Mais une telle missive va nous le ramener c'est sûr !
Bravo Sprite !

Dommage pour ce cher Carl qui rate une bien belle correspondance.
Et comme dit Nerwen, t'imaginer sur la stèle de ce personnage, t'offusquant du comportement de la gent masculine, ça vaut son pesant de centimes

Je ne le crie pas sur tous les toits, facile à comprendre pourquoi, mais j'aime les cimetières, et les pierres tombales qui sortent du commun.
Alors, évidement, j'adore ton PS (le texte aussi, je précise )

Un jour, lors de mes balades, j'ai découvert la tombe d'un jeune homme avec l'inscription "Here lies whatever was mortal in me". C'était au printemps, l'endroit était bleu de pervenches.
J'ai trouvé l'épitaphe si originale qu'elle s'est gravée dans mon esprit

Est-elle courante en pays anglo-saxon ?

Si elle est courante, je ne la connais pas et Google ne donne rien du tout non plus.

Te souviens-tu ou c'etait? La pervenche etant une de mes fleurs prefere, j'aime beaucoup l'image que tu depeins, et avoues que les cimetieres anglophones sont tout aussi exentriques que leurs habitants d'origine... enfin depuis les invasions Saxonnes.

Oser appuyer sa bécane contre la stèle du grand Karl , je suis certain qu'il aurait aimé car je ne pense pas qu'il eut jamais souhaité être idolatré de son vivant ou depuis l'au-delà ...

Et il devait rire dans sa barbe quand il t'entendait pester contre ceux qui en fait , n'étaient là que pour lui !

Ne serait-ce que pour cela, il va resurgir des archives pour te donner une réponse !

Sprite a écrit:

Te souviens-tu ou c'etait

Je me souviens très bien, ce n'est pas loin de chez moi. J'ai bien envie d'y retourner, et de faire des photos. Affaire à suivre

Pas loin de chez toi et ecrit en anglais? Tres curieux.

Les pervenches sont en fleurs maintenant ici... mais chez toi, elles sont peut-etre deja passees. En tout cas, si tu prends des photos, j'aimerais bien les voir.

Vraiment dommage que Karl est archivé, car tu méritais une réponse d'une si bonne lettre, et ça m'aurait aussi intéressé de voir qu'allait-il écrire.

J'aimerais lire ton essai ...Ca doit pas être triste !
Quel humour !

Des que je le retrouve cet essai, je te l'envoie!!

J'avais eu 0% du jamais vu! meme pas un point pour l'impression et pour l'encre! Ils avaient parait-il du le montrer a un examinateur exterieur qui a tranche en disant: hors sujet! point final!

Mais deux des 'profs' femmes du departement m'avaient dit que ca les avait fortement interesse!

Faut dire que je sortais a peine du plus dur... et que j'etais vraiment dejantee vis a vis de la norme.

Je viens de le retrouver cet Essai, passes-moi ton mail par PM et tu pourras le decortiquer!

Ecris avant que les tours de Manhattan (j'ai dit Manhattan, pas Manhater) tombent, ma conclusion me donne un peu la chaire de poule.

Tu veux dire quoi qu'a pas change, mes fotes d'or trop graphes?

Karl t'a surement tout dit ce jour là. En fait c'était lui sous les traits de ces importuns, tu n'as pas vu ? Il testait ta volonté et ta rage, un peu plus et il crevait ton pneu de vélo, celui de l'avant, le plus fragile...parce que celui d'après....hein ?
Oui un peu plus et il se chargeait de ta monture histoire de te voir jurer en juron et craquer quelques vertèbres. Pour le kama Sutra faire craquer des vertèbres c'est bon.

Karl n'y comprend plus rien c'est pourquoi il est indisponible ou archivé. Archivé étant la pire des insultes dans son cas. Réduit au silence au fond d'un placard aéré à bouffer des mythes volantes qui se transforment en papillons sous ses yeux. la nique au vieux Père, des mythes de prolétaires qui se sont libérés de leurs complexes et voteront , au passage, pour l'extrème droite en France nous dit-on.
Marx se tait et bouffe sa barbe, ses savates et son mirliton. Si c'était à refaire il referait encore plus, pour ces crétins d'humains qui n'ont rien compris de sa philosophie. Avec Gandhi, tu le sais, ils se baignent dans le Gange, nus tous deux, béats et indolents.