Un souffle de vent, quelques gouttes de pluie, la zébrure d’un éclair, et ils partiront.
Corps frissonnants, ils plieront leurs parasols comme le campement d’une Africa korps en déroute dans le désert et mettront en berne les drapeaux multicolores de leurs serviettes.
Ils remballeront leurs strings, leurs bi, mono, zéro kinis.
Ils emporteront leurs cris et ceux de leurs transistors.
Ils emporteront leurs fesses, leurs seins, leurs cuisses leurs oreilles et tous leurs autres voleurs de soleil.
Ils abandonneront les deux mètres carrés d’espace vital durement conquis et leur vue imprenable sur le ciel.
Alors le sable reprendra sa liberté. Il n’aura plus à subir les travaux forcés de la confection d’insipides pâtés et de l’édification de prétentieux châteaux. Son unique fierté sera d’être le grain de peau de la plage. Il n’obéira plus qu’aux caprices du vent et de la marée
Les panneaux n’afficheront plus « Plage surveillée ». La mer, réputée mauvaise mère, noyeuse d’enfants, ne sera plus dans le collimateur.
Alors on entendra à nouveau le chuchotis des vagues et leur dialogue avec les mouettes.
Alors, solitaire, tu marcheras sur la plage et tes empreintes légères seront comme la trace des baisers.
Tes poumons se gonfleront du vent comme les voiles lointaines.
Tes yeux boiront l’horizon.
Sans planche et sans scooter des mers, tu gagneras le grand large.
Alors tu diras avec le poète « Homme libre, toujours tu chériras la mer ! »
Et tu ajouteras : « Oui, mais pas en été ».