Retenir l'été:
Pour le bonheur que m’a procuré le rassemblement de ma tribu, certains dimanches de juillet et d’aout. Porter un regard de fierté sur mes 3 morceaux de cœur que j’aime au plus profond de ma chair. Les voir doucement mettre une patte hors du nid, ou carrément s’envoler vers une vie professionnelle ou émotionnelle riche de toutes leurs envies.
Pour le plaisir de bricoler avec mon homme impatient, râleur, et finalement rallié à mon enthousiasme d’ouvrière du dimanche. Voir la maison se colorer de chaud, de doux, de tons bruns et beiges, pour un hiver cocooning. Avoir toujours la prochaine idée déco en tête et jouer les architectes.
Pour redécouvrir l’amour de ma sœur, mon aînée, renouer les liens parfois tendus par la distance, par ma distance. Retrouver la simplicité des regards partagés sur nos enfants, sur les odeurs passées, sur ce présent qui nous retient l’une à l’autre. Réaliser comme mes enfants sont les siens et comme les siens sont les miens. Nous inquiéter pour eux, nous rassurer, et partager notre fierté d’avoir des mômes « vraiment bien ». Panser nos blessures d’enfance. Parler, très peu de notre père, beaucoup de notre mère. Admirer son courage face à la maladie, malgré la jambe qui traîne, les gestes moins sûrs, la marche plus lente. Prendre une grande leçon de vie en la regardant vivre.
Pour l’immense joie et fierté mélangées d’un rendez-vous improbable entre «une rencontre à haut risque» et «une toujours partante». Découvrir qu’elle est comme ses mots : directe, sincère, passionnée par l’écriture. Partager des moments magnifiques sur nos feuilles penchées, à lire et écrire. Se renvoyer la balle comme si on l’avait toujours fait, comme si nous étions destinées à ce partage. Des mots qui s’emboitent parfaitement, et l’étonnement de le découvrir. Et la joie qui suit, indéfinissable et qui paraît ne jamais vouloir s’arrêter.
Pour garder intacte cette colère qui me fait me lever, hurler, gueuler, et puis employer ce que je connais le mieux, les mots, pour fustiger ce pouvoir qui s’octroie tous les droits. Ne pas vouloir de ça pour mes enfants, et plus tard mes petits-enfants. Ne pas perdre de vue que :
- Les hommes sont nés libres et égaux en dignité et en droit.
- Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression
- Nul homme ne peut être accusé, arrêté ou détenu que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires doivent être punis
- Que la force publique est instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux à qui elle est confiée
Constater que ces articles1, 2, 7 et 12, faisant partie de la déclaration des droits de l’homme rédigée le 26 août 1789 par les représentants du peuple Français constitués en Assemblée Nationale, sont bafoués par un président élu pour représenter ce même peuple Français.
Espérer que tous ceux qui ont la capacité de lire, d’écrire, de comprendre, d’entendre le désarroi des plus démunis, des moins chanceux, sauront aussi se mettre en colère.
Qu’ils diront tout haut, qu’il écriront en silence l’injustice qui frappe les sans-voix, les sans-abris, les sans-importance, les sans droit de vote.
Retenir l’été encore un peu, pour prendre des forces pour l’hiver à venir !