Kaléïdoplumes 2 : 2010 / 2013
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 "Un seul être vous manque"

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2 participants
AuteurMessage
PivoineBlanche
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MessageSujet: "Un seul être vous manque"   "Un seul être vous manque" I_icon_minitimeMer 30 Mar 2011 - 22:59

Amélioré quelque peu...

J'ai vécu un beau dernier trimestre en cette année 1973. Il y a eu ma dernière fancy-fair d'école... Mais ma première soirée dansante. Et un long slow, dansé sur "Child in time" de Deep Purple, qui n'était pourtant pas qu'un slow, puisque la musique explose en plein milieu du morceau. C'était des tee-shirts de toutes les couleurs, des bracelets en cuir noués, du khôl à l'intérieur des paupières, et je passais bien trop de temps à me mirer dans le coin du lavabo, en classe, qu'à préparer mes affaires... Après m'avoir lu, un de mes amis, récemment, m'a parlé de ces soirées (et des garçons) m'a rétorqué que j'en parlais peu. Mais il y avait tellement peu à en dire! Les garçons de l'athénée d'Ixelles débarquaient le jour de leur fête (ils avaient un jour de fête, eux?) pour venir envahir le lycée et jeter de la farine, des oeufs, de la bière, et des pétards pirate. On les revoyait l'année suivante, le 20 novembre, jour de fête des étudiants de l'Université Libre de Bruxelles. Pour remettre le couvert. J'ai toujours eu horreur de ça. Ce n'est qu'un an plus tard que j'ai connu des élèves (mâles, lol!) d'un autre collège d'Ixelles, beaucoup plus intéressant et encore admirablement coté, aujourd'hui.

Et toujours les manifestations étudiantes, au rythme de "Faites l'amour, pas la guerre". Nous avions, en Belgique, tiens donc! Un ministre de la Défense nationale très controversé... Il régnait un vent de fronde, dans les écoles. Cependant, l'année s'est terminée calmement.

Passons sur mes résultats scolaires, très mélangés, pour arriver à des vacances dans une adorable fermette, dans un village du Hainaut, que j'ai adorées. Et sur les longues journées passées à lire "Les mémoires d'une Jeune fille rangée", à cuisiner, à faire des desserts à base de crème et d'oeufs frais, à correspondre, à voir deux amies qui étaient en vacances non loin, à visiter la région, et à courir à la ferme voisine. Cette ferme! C'est là qu'il y avait un verger plein de cerisiers, des champs à perte de vue, une porcherie à l'odeur aigre, mais où j'ai assisté pour la première fois à la naissance de petits cochons. Et puis, plus loin, de l'autre côté de la forêt, l'abbaye trappistine de Scourmont.

Et puis, je tenais mon journal. Ah! Ce journal! Je l'ai tenu -brièvement- pendant ma treizième année, abandonné, puis repris à l'époque du lycée. Peut-être aurais-je abandonné si écrire n'allait devenir, à cette époque, si important. J'ai détruit ces cahiers d'adolescence, et je ne le regrette pas. Il n'y avait rien d'intéressant là-dedans. Vraiment. L'incendie (car il ne pouvait être question de détruire l'intime que par le feu), a peut-être été trop violent. J'ai brûlé beaucoup de poèmes aussi, écrits plus tard, et ça, c'est dommage, mais c'est ainsi et je ne vais pas pleurer là-dessus, de toute façon, c'est trop tard.

Dans le cahier que je tenais cet été-là, il a été question pour la première fois de mon professeur, en des termes beaucoup plus affectueux que je ne l'avais jamais fait pour aucun autre. J'étais lucide quant au fait qu'elle m'aimait bien -ou beaucoup?- J'espérais surtout l'avoir encore comme prof l'année suivante. Même si elle m'intimidait affreusement. Car elle m'intimidait très fort. Pourquoi ? Elle pouvait être parfois grinçante et ironique, mais je n'avais jamais eu à en pâtir. Au contraire. Ce qui l'intriguait (c'est ce qui ressortait de ses exhortations et de ses appréciations dans mon bulletin), c'était que j'écrivais si volontiers et si facilement, alors qu'en classe, je parlais peu. J'étais attentive, oui, petit à petit, j'appréciais l'originalité de sa pédagogie, j'avais envie de "participer", mais je n'osais pas. Et moins j'osais, plus elle insistait. Et plus elle insistait, plus je me repliais dans ma coquille.

J'allais rester souvent très au centre de ma coquille, mais j'allais enfin éprouver, dès la rentrée, un regain d'intérêt -et un intérêt profond- pour mes études... Mais pas tout de suite. A la rentrée, nos classes avaient été mélangées, nous avions perdu des copines et des profs. Et Elle. Je n'étais pas la seule à pleurer qu'un seul être vous manque et que tout est dépeuplé! Je crois même que je m'étendais peu sur le sujet et que j'écoutais plutôt les autres la regretter. Mais je regrettais aussi, ô combien!

***

Jusqu'ici, rien de bien passionnant. Pourtant, c'est capital dans la suite de mon histoire. Car le 21 septembre, le jour de mon anniversaire, un vendredi après-midi, on nous confirme que dès le lundi, les classes seront remaniées, que les latines sont regroupées et que nous repassons en A, et que donc, nous retrouvons les professeurs de la 3ème latin-grec A...

Si je fais un effort de mémorisation, je retrouve mon impatience de ce week-end là, la joie de mon anniversaire, les cadeaux reçus, (dont le 33 tours de John Lennon, "Plastic Ono band"). Un bonheur qui se savoure à l'avance. En même temps qu'une attente impatiente, mais qui n'aura rien de commun avec d'autres attentes ultérieures, bien plus angoissantes. Je me souviens aussi de la longueur du lundi matin, avant mon premier "nouveau" cours de français. Comme nous entrons en secondaire supérieur, il n'y aura quasiment plus de grammaire - surtout de la littérature. Littérature du Moyen Age, classique, moderne, contemporaine.

Ce lundi après-midi là, j'aurais pu l'intituler "la couleur bleue". Peut-être que selon la lumière des jours et la tonalité des couloirs, la couleur de ses yeux changeait-elle? Dans mon souvenir, ce jour-là est bleu, bleu et noir, clair et vitré, et les mots coulent jusqu'à moi comme une rivière fraîche et lointaine, qui étanchera, je le crois, à jamais ma soif... Je vis un de ces instants si fugaces et en même temps si aigus, où l'on est pleinement et totalement heureux dans une vie. Je le vis et je ne le sais pas. Si seulement on le savait!

Ce jour-là, nous commençons par la Passion et la fatalité faites texte, "Andromaque", et puis "Phèdre"; ô! Amours à sens unique. Mais aussi et surtout, ô plus beaux vers de la langue française...

Et là, faisons-nous plaisir, abandonnons-nous seulement au lyrisme...

" (...) Mon mal vient de plus loin. À peine au fils d’Égée
Sous les lois de l’hymen je m’étais engagée,
Mon repos, mon bonheur semblait être affermi,
Athènes me montra mon superbe ennemi.
Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
Un trouble s’éleva dans mon âme éperdue ;
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;
Je sentis tout mon corps, et transir et brûler.
Je reconnus Vénus et ses feux redoutables,
D’un sang qu’elle poursuit tourments inévitables. (...)"

Jean RACINE, "Phèdre",

Acte I, scène III, la confidence de Phèdre à Oenone.
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sol-eille
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sol-eille



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MessageSujet: Re: "Un seul être vous manque"   "Un seul être vous manque" I_icon_minitimeDim 3 Avr 2011 - 17:18

C'est toujours curieux de se replonger dans ses années lycées !!!
C'est un état si particulier l'adolescence...
Et j'admire le fait que tu te souviennes encore de ces vers...
remarque à y réfléchir je connais encore pratiquement par coeur :
"Mignonne allons voir si la rose qui ce matin avait déclose..."
qui était pour moi un des plus beaux poèmes de la langue Française.
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