Les femmes de couleur se trempent dans le fleuve
Où flottent les brindilles
Du terne quotidien.
Postées par tous les temps là où coule la vie,
Elles voient les remous prendre toutes les teintes
Des tempêtes aux cieux.
La mer recommencée des saisons secouées
Charrie les fumerolles d’un poème éreinté
Du printemps à l’hiver.
La piste dans le soir se couvre de fumée
Quand Prosper Mérimée, qu’on nomme aussi « Soleil »
A terminé sa course et tombe. Youp la Boum !
Ici on ne voit pas se pointer l’éléphant,
Le tigre ne vient pas feuler près du point d’eau ;
Nul émir ne promet qu’il va sortir les tripes
Aux roués que sa garde a pris parmi la foule.
Pas une miette d’exotisme en cette populace folle
Qui promptement ôte ses pas du môle gris.
Les femmes de couleur attendent le poète,
L’empire des ses mots qui les couvrira d’aise,
Le feu de son regard au cœur de leurs fêlures.
Les fesses en émoi et le sein qui miroite,
Les muses savent bien que le rémouleur fou
Ne tempère jamais son tempo ni la force
De son chant louangeur.
Elles offrent leur cul au Crusoe de fortune,
Leur cœur au pitre qui les frôle des ses mots moites.
A ce prêtre des fleurs mises en bouquets de prose
Les femmes de couleur offrent leur popotin,
Leur périnée, leur soie et, ultime pompon,
Toutes leurs formes ! Pour sa pomme !
Elles se sont promis que rentreraient un jour,
Dans sa tête où pédale un oiseau de semoule,
Leurs prénoms, leurs couleurs et leur rang sur la place
De Bretagne !