- Arachnée, voyons, sors de là que nous puissions calmement discuter toi et moi autour d'un apéritif de mouches.
- Non!
- Arachnée, voyons, ne fais pas l'enfant et sors de ce piano!
- Non, docteur, je ne sortirai pas!
- Mais enfin Arachnée, que se passe-t-il? Ça fait maintenant deux semaines que tu refuses de quitter l'abri de ce piano et cette pièce vétuste.
- Ce qui se passe? Ce qui se passe docteur? (et la voix monte dans les aigus de façon inquiétante)... Il se passe que je craque docteur! Que j'en ai ras les pattes et le réservoir à fil de passer mon temps à tisser des toiles que tout le monde déchire et piétine sans aucun scrupule... Je craque docteur! J'en peux plus de faire semblant... On nage en pleine hypocrisie en permanence! Je peux plus, ça m'étouffe, ça me donne alternativement envie de hurler et envie de me pendre à la plus haute poutre de la plus haute maison de ce bled paumé où nous avons élu domicile! J'en ai ras les pattes de raconter des bobards à nos gamins....
- Mais enfin Arachnée....
Et taisez vous! Pour une fois, juste une fois, laissez moi parler! Je sais très bien que vous oublierez aussitôt tout ce que j'ai pu vous dire, que vous aurez bien vite des patients bien plus importants que la pauvre prof de tissage élémentaire...
- Arachnée, je ne te permets pas!
- La ferme, docteur! Aujourd'hui c'est moi qui cause, pour la dernière fois! La ferme!
Rafale de vent dans la pièce.
Bruit du toit du piano retombant lourdement sur la malheureuse Arachnée.
Clac final.