— Ben ! C'est quoi ce bordel ? Hey, toi ! Dégage de mon piano !
— Ah c'est ça, un piano ? Pas mal...
— Non mais dans quel état tu l'as mis ! Un piano quasi neuf ! À peine 150 ans...
— C'est donc ça, ce petit arrière-goût faisandé... mmhhhh !
— Quand je pense que les plus grands l'ont utilisé, qu'ils ont créé dessus les plus belles pages de la musique... je... non mais je cauchemarde, là !
— Rho, arrête de râler. Moi, je recycle, c'est tout. Ya qu'un truc un poil indigeste, c'est ces sortes de spaghettis en fer, dedans, mais sinon...
— Pasqu'il le mange en plus !
— Ben t'as jamais vu de termite ou quoi ? Et pis t'es qui d'ailleurs, pour me gueuler dessus comme ça ?
— J'ÉTAIS le proprio de ton repas, parasite !
— Parasite ?! Non mais tu t'es regardé, d'abord ? Rho le cafard qui se prend pour un mélomane, hé !
— Je suis pas un cafard ! Je suis un cloporte, nuance...
— Pfeu c'pareil...
— Non Môssieur, c'pô pareil. Et puis le problème est pas là ! Je vais jouer où, moi, maintenant ?
— Pasque tu joues ? Mouahahah, même pas vrai !
— Co-comment ça, c'est pas vrai ! Pousse-toi, que je te montre, ignare...
Bernie la termite se poussa et laissa Jojo le cloporte à l'œuvre. Ce dernier se concentra quelques instants, et soudain le miracle se produisit. Jojo cavalait d'un bout à l'autre du clavier à une vitesse hallucinante, créait des harmoniques improbables, des accords divins et Bernie, qui n'avait jamais entendu pareille symphonie, en resta coi. Ce fut dans un silence religieux que Jojo arrêta sa course folle.
— Woaw...
— Ben c'est pas aussi bien qu'avant, forcément... ce sera plus jamais comme avant, snif...
— Allez mec, te bile pas ! J'ai la solution à notre problème ! Je vais pouvoir finir de bouffer, et après, je t'emmène droit au paradis !
— Hein ?
— Ben ouais, j'ai zoné à l'Opéra, juste avant de débarquer ici. Chuis sûr que t'y trouveras son p'tit frère, va ! Et si tu promets de me faire le show tous les soirs, je te le boufferai pas, celui-là, juré-craché !