J’ai fait sa connaissance le jour de son indépendance.
En plaquant sur sa façade une pancarte avec « A vendre » en gros, grand et gras, la propriétaire a signé, et reconnu son nouveau statut de maison libre .
Je n’en croyais pas mes yeux : Quoi, une telle beauté était « A Vendre » ?
Cela frisait l’indécence, le crime à sa majesté et pourtant je ne boudais pas ma joie.
Une conquête, une victoire était à ma portée. J’allais enfin pouvoir réaliser mon envie de restauratrice, de maîtresse… d’une maison.
J’allais à travers elle, réaliser tous mes désirs refoulés, mes fantasmes reconnus et assouvir mes besoins d’intériorité, de calme et de beauté.
Il y avait longtemps que je lui rendais visite durant mes promenades en campagne. A chaque fois un émerveillement et le rêve d’y établir ma demeure.
Mais les rêves sont ce qu’ils sont : des rêves. Quant à ce que ceux-ci deviennent réalités, c’est une autre histoire où la chance et le hasard ont un rôle à prendre et à jouer.
Mes yeux s’étaient déjà faufilés au-delà son portail pour y capter le bien-être des lieux, mes jambes s’étaient même risquées un après midi à oser escalader le petit mur de son jardin de curé. Mon nez y avait reniflé et goûté le parfum de ses vieux rosiers.
Mais Madame était toujours occupée!
Mon rêve est devenu réalité un dimanche de mai.
Le travail de restauration a commencé des profondeurs de la cave à la charpente du toit.
J’ai vue ma maison squelettique, toute nue tenir bon sur sa base malgré les coups de marteau, les cris des scies taillant, arrachant le ridé, le pourri dans une opération digne de chirurgie esthétique.
Maintenant elle va mieux,elle va même très bien, elle a repris ses forces et ses couleurs.
Elle est belle à chanter.
Ses fenêtres sourient à force de regarder la lumière.
Sur sa porte est écrit : Entrez sans frapper.
J’y vais.