La nouvelle se répandit à la vitesse de l’éclair : le canard après s’être farci la dinde, avait disparu avec elle sans laisser de trace ou de lettre à la poulaillerie.
On avait bien tenté de les atteindre sur leur portable mais le répondeur du canard et de la dinde caquetaient en chœur un même message , des « coincoin » et encore des « coincoin » nous ne sommes pas disponibles. Veuillez rappeler plus tard. »
Cela ne faisait pas l’affaire de la fermière. Elle avait en effet mis toutes ses espérances dans ses deux superbes gallinacées pour son menu de fin d’année et pour cela, les avait peaufinés, grassouillés de la crète aux pattes en passant par le ventre dans le corps central du sujet à savoir le blanc( ce qu’elle préfère ).
Elle avait gavé son canard chéri d’ amour et de tendresse. Et lui, qui souffrait d’anorexie physique et mentale ( oui oui cela existe aussi chez nos trente millions d’amis) avait repris goût à la nourriture fait maison et aux cannes ou autres poulettes et volatiles sans distinction .
Quant à la dinde , si elle était devenue si grosse et bonne pour le cuissage, c’était en fait pour pouvoir en mettre plein la vue au jury de l’élection de miss dinde (qu’elle avait d’ailleurs gagné) et prendre ainsi sa revanche sur ses copines qui l’embêtaient du matin au soir car jalouses de son poids et de ses plumes.
La fermière savait bien ce qui se tramait entre ces deux là mais de là, à faire une fugue adolescente, de là, à ne pas donner signe de vie c’était bien au-delà de ce qu’elle aurait pu imaginer.
Elle alla crier orage et désespoir au fermier son mari. Le mari n’est pas futé c’est là son moindre défaut et pourtant il en avait connu dans la grange, des rouges et des bien mûres avec qui il avait fait le beau et la bête . Même qu’une fois… il avait fallu appeler les pompiers pour éteindre le feu …
Le mari ne fut d’aucun secours, il avait d’autres chattes à fouetter…
La fermière jura mais un peu tard qu’on ne l’y reprendrait plus.
Ce fut donc un Noël sans foie et sans dinde…
Avec une buche flambée quand même.
Quant au canard et à la dinde, on ne les retrouva jamais.
J’ai plaisir à me raconter qu’ils furent heureux et pondirent beaucoup d’ œufs pour les cloches à Pâques.