A n’ouvrir qu’après ma mort…
Une chose inimaginable…consigne donnée
Ceci est mon testament.
Monsieur le Notaire Appelmans vous a donné lecture de votre héritage.
Je lui ai également demandé de vous lire la 2e partie de l’acte, partie, mes chers petits et grands enfants qui ne manquera pas de vous surprendre à bien des égards…
A part La mère, la mamy que vous connaissez tous, toute en rondeurs, garde d’enfants, pourvoyeuse de conseils et consolatrice des affligés, le reste ne vous intéressait pas !
« Pas le temps », phrase sacro-sainte que vous me renvoyiez sans cesse quand j’essayais, en vain, de vous parler un peu de moi…
Vous voici donc obligatoirement confrontés à la face cachée de l’iceberg.
Le moment est venu de vous narrer les péripéties du Titanic !
Et, non ! Je ne suis pas devenue débile ! Je suis en pleine possession de mes facultés mentales, Monsieur le Notaire pourra en témoigner…
Quand j’ai eu 18 ans, mes parents ( qui jusque là m’avaient donné une stricte éducation BCBG, études chez les bonnes sœurs etc…) m’ont enfin accordé la permission de fréquenter le club de jeunes de la paroisse, assurés qu’ils étaient que j’y serais en bonne compagnie et supervisée par le vicaire organisateur.
A cet âge, j’accusais une nette ressemblance avec Brigitte Bardot, en moins blonde ! Pas timide pour un sou et lippe boudeuse à souhait …
Ce soir-là, mon premier soir de sortie, la taille bien serrée dans ma robe rose à petits carreaux vichy, les ballerines rouges prêtes à twister sur la piste de danse, je fis une entrée remarquée à « L’Os à Moëlle »
Et tout de suite, je me retrouvai dans un tourbillon de jeunes à danser le rock jusqu’à épuisement, jusqu’à l’interruption pour le spectacle du samedi soir sur une modeste estrade de bois.
C’est là que je le vis pour la première fois…
Très grand, très maigre, pas vraiment beau, mais moi je le trouvais « divin »
Il se mit à gratter sa guitare et entonnaient des airs familiers que tous les scouts de Belgique connaissaient.
Il avait une voix rauque et grave.
Soudain, il me remarqua et sembla s’adresser à moi pour chanter sa dernière composition :
« Sur la place dorée au soleil, une fille s’est mise à danser… »
Je me mis à trembler intérieurement, une boule dans la gorge…
Mes yeux ne quittaient plus les siens.
Quand ce fut fini, il salua sous les applaudissements de toute cette jeunesse enthousiaste.
Il descendit de scène, couvert de sueur et se dirigea droit vers moi, dédaignant les autres.
« Je t’offre un verre ? »
Incapable de prononcer un mot, je le suivis au bar, le cœur en feu.
Ce fut lui qui me paya mon premier whisky-coca et m’alluma ma première cigarette.
J’ignorais à ce moment qu’ils seraient suivis de beaucoup d’autres…