Une vie de chien !

Modératrice

Ils ne savent plus quoi inventer !
Quand je dis « ils », je parle de nos propriétaires, des vétérinaires et autres comportementalistes. Quelle vie de chien ! Voulez-vous que je vous raconte, comment, moi, un animal si équilibré, je me suis retrouvé dans cette situation infamante, avec cette pancarte affichée à la porte du jardin ? Au vu et au su de tous les chiens du quartier ? Et bien, je le dois à un Judas en jupons, à ma maîtresse, cette traitresse ! Non contente de me traîner chez le psychanalyste, elle proclame ma honte, elle la placarde, elle en fait étalage ostensiblement, sans respect pour ma pudeur canine. Parce que j’en entends des questions idiotes de la part des copains du quartier, du genre « Qu’est-ce tu as fait ? Elle doit en avoir assez de tes frasques… » Et jusqu’à ce débile de bichon Maltais du 53 qui m’a dit : « Attention, la prochaine étape pour toi, ce sera la fourrière ! » Celui-là il ferait bien de faire attention à ses biches ! Si je le coince derrière la haie, il va passer un mauvais quart d’heure ! Et puis il y a les ignares qui m’interrogent « C’est quoi un sykanalisse ? Ça fait mal ? » Bien sûr, je ne réponds pas :"je ne parle pas aux cons, ça les instruit", mais je ronge mon frein…

Peut-être êtes-vous curieux, vous aussi, de savoir ce qui me vaut ce triste traitement ? Et bien, voilà !
Depuis tout petit, s’il y a UNE chose que je ne peux pas supporter — et je me suis laissé dire que c’était commun à beaucoup de chiens — c’est bien l’UNIFORME ! Cette phobie (depuis que je fréquente LE spécialiste, j’ai appris des mots…), m’a procuré des aventures pas possibles, des situations jubilatoires, en un mot l’extase !

Tenez, ma première expérience, je la dois au facteur. Un jeune gringalet qui, sur son vélo estampillé PTT, me narguait ouvertement quand j’étais dans le jardin. Séparés par la solide barrière il n’arrêtait pas, malgré mes aboiements de mise en garde, de bêtifier « C’est qui le gentil toutou ? Il est de mauvaise humeur aujourd’hui ? Kiss, kiss ! Attrape ! Allez, attrape ! » Et d’agiter le journal dans ma direction avant de le glisser prestement dans la boîte aux lettres. J’aurais pu sauter et lui arracher le journal et, peut-être, deux ou trois doigts par accident, mais, patiemment, jour après jour, j’attendais mon heure… Et elle est arrivée, un beau matin où le portail avait été seulement négligemment poussé.

Quand, grâce au grincement de son pédalier j’ai entendu arriver mon tourmenteur, j’ai jailli hors du jardin comme un diable hors de sa boîte ! La peur qu’il a eue ! Sans avoir eu le temps de freiner, il était déjà par terre ! Se servant de son vélo comme d’un frêle rempart, adossé à la barrière, il s’est mis à brailler : « Au secours ! Madame, votre chien ! Retenez votre chien ! Retenez-le ! »
Les poils du garrot hérissés, la gueule dégoulinante de bave, je faisais de bonds spectaculaires en poussant des aboiements dignes de mon célèbre cousin des Baskervilles. Quand ma maîtresse, alertée par ses cris, a réussi à m’attraper par le collier, le facteur est remonté sur sa bécane et je vous assure qu’il filait comme le vent. D’ailleurs, ce matin-là, il n’y a pas eu de journal à la maison.

Le deuxième incident a eu lieu pour la fête du village où j’ai semé la panique dans le défilé des majorettes : vous comprenez que ces mollets dodus sous les jupettes pailletées étaient une vraie tentation ! Capturé de justesse, j’avais quand même eu la satisfaction de me faire les crocs sur le pantalon galonné du chef de la fanfare !

Mais ce qui a décidé ma maîtresse à consulter un homme de l’art, ce fut ma dernière « intervention » quand le voisin, dépassé par son feu de broussailles a fait appel aux pompiers. Déplacés pour un si petit feu, ils auraient pu arriver discrètement, mais que nenni ! Sirène hurlante et boutons rutilants sur uniformes impeccables les trois hommes armés de gros extincteurs ont investi les lieux. Quand ils m’ont vu débouler telle une fusée, la belle ordonnance du groupe a quelque peu vacillé. Pas pour longtemps car j’avais sous-estimé la puissance des extincteurs. Cueilli en plein vol, au moment où j’allais attaquer, celle-ci stoppa net mon élan. Il n’y a pas à dire, les pompiers savent faire face !

Ce que le capitaine des pompiers a dit à ma maîtresse, je ne l’ai pas entendu. J’avais assez à faire à me rouler dans l’herbe pour essayer de ma débarrasser de la mousse qui me brulait les yeux et me paralysait les babines, mais il n’avait pas l’air content du tout. Et c’est ainsi qu’à la suite de leur petit conciliabule ma maîtresse a pris rendez-vous avec le psychanalyste.

Sous sa férule je fais des progrès. Lentement. Avec des rechutes. Comme aujourd’hui avec la retransmission télévisée du défilé du 8 mai : les images sont si réalistes sur le nouvel écran 3D que j’ai replongé !

Kalé'reporter

Le facteur, les pompiers, les militaires,… Passe encore ! éclat de rire

Zont De quoi se défendre… Razz

Mais les majorettes !!! calimero

Le sikanalisse a encore du taf pale

faudra aussi qu'il soigne la maîtresse à mon avis… sifflotte

Modératrice

Voilà un chien qui fait des fixations pas banales...
Au prix de l'écran 3D, il va coûter cher à sa maîtresse !
Excellents, tes portraits de personnages divers, un vrai petit film on visualise très bien les scènes et le résultat est hilarant ! mort de rire

Admin

Merci, merci Nerwen pour cet excellent moment de lecture. Bravo winner

Kalé'reporter

Citation :: Tenez, ma première expérience, je la dois au facteur

Que les âmes sensibles s'éloignent: ceci me rappelle un souvenir.

Il y avait un roquet particulièrement agressif envers un facteur de la région parisienne, une banlieue huppée où les grandes propriétés vont de pair avec les molosses, d'où l'agacement perpétuel des préposés.
Le roquet compensait sa petite taille par une agressivité méfiante: il se tenait plutôt à l'arrière des visiteurs.
Ce matin-là, ils étaient face à face sur le perron dans l'attente que Madame se pare d'un tenue décente pour signer son récépissé.
- Ouah ! ouah ! ouah ! disait le cabot...
- C'est ça, viens-y ...
Ne sachant résister à la provoc, le cabot fut enfin à la portée du brodequin du facteur.
Plaf !!! En plein dans la cible, c'est à dire le poitrail du toutou.
S'en suivit un vol plané de quatre mètres accompagné de kaï ! kaï ! indignés.
A partir de ce jour, un seul regard du facteur suffisait à tenir le roquet à distance.
Quant au traumatisme canin, il appartenait au mari de la propriétaire, médecin, d'y remédier...

Nerwen voudra bien excuser mon outrecuidance : le brodequin bien appliqué ne serait-il pas une thérapie efficace ? lol!

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