La rumeur courait depuis quelques temps déjà parmi les animaux du coin, que le matou de la maison se comportait de bien étrange façon.
Il est vrai qu’un chat libre de ses mouvements vit selon des principes bien connus : dormir, manger, épier les oiseaux, les mulots, les taupes, en croquer quelques uns, et courir les minettes en temps voulu.
Mais pas celui-ci
Il passait tout son temps à dormir et manger, bien installé, il est vrai, sur de confortables coussins ou de moelleux édredons.
Ses maîtres, de braves gens aimant les bêtes, n’y trouvaient rien à redire, les souris du grenier non plus, les taupes du jardin pas davantage.
Une seule population s’inquiétait de la situation : les volatiles du voisinage, qui s’ennuyaient et trouvaient leur quotidien bien terne sans un agile chasseur à leur trousse.
Même s’ils reconnaissaient volontiers que les chats contemporains préféraient écouter le doux bruit des croquettes emplissant leur gamelle, que leur instinct de prédateur.
Les oiseaux finalement décidèrent d’envoyer un courageux émissaire auprès du rebelle, pour éclaircir l’affaire.
Daphnée, le perroquet femelle de la maison, en place sur les lieux depuis de nombreuses années, et libre d’aller et venir à sa guise, accepta la mission, intriguée elle aussi par le comportement si paisible et presque amorphe de son colocataire.
C’est ainsi, que pleine d’assurance mais l’œil aux aguets, elle se rendit près du félin somnolent.
Il ne bougea même pas quand elle se pencha sur lui.
Pas démontée pour autant, elle lui demanda :
— Alors, cher ami ? Vous vous sentez souffrant ? Voyons un peu, « dites 33 ».
Ouvrant à demi un œil morne, le cher ami répondit :
— Pour quoi faire ? En vérité je me sens seul. C’est peu courant chez les chats, mais c’est comme ça.
Je manque de compagnie, d’amitié, de contact et je crois bien que je déprime. C’est grave docteur ?
Rassurée, Daphnée réagit aussitôt
— Mais pas du tout, j’ai même un remède à te proposer !
On pourrait devenir amis. En vivant sous le même toi, ça serait plus convivial, non ?
Et puis, tu sais, finalement, la vie à deux, c’est mieux !