Buis-les-Baronnies, Octidi 8 Germinal de l’an 1795
Ma très chère Marie-Caroline,
Une réponse de vous m’honore à un point tel que la tête m’en tourne !
Que vous, si prise par vos multiples et passionnantes occupations, ayez trouvé du temps pour moi !
Moi, qui me languis dans mon village des Baronnies et ne cesse de penser à vous.
Saviez-vous que je suis pépiniériste à mes heures et que disposant d’une assez vaste serre bien orientée plein sud, j’y cultive des variétés inédites de laurier ? Je suis amoureux du laurier, la plus fascinante plante du Sud.
Mon préféré est le laurier rose, quoique je sois assez fier de mon blanc et de mon rouge également. Mais je parle comme un viticulteur que je ne suis point !
J’ai commis depuis quelques mois une greffe, qui donne depuis hier une fleur bicolore, rose et blanche, que j’ai baptisée MC en votre honneur.
Car E= MC2, mon amour, ne le dit-on pas ?
Je l’ai lu récemment. J’ai même osé un petit poème sur ce thème.
Me permettriez-vous de venir vous le lire à Lyon, lors d’une prochaine réunion de votre cercle de plumes ?
Ce pourrait même être une bonne idée de consigne : E=MC2, mon amour… Qu’en dites-vous ?
En même temps, je vous apporterai votre laurier MC.
J’ai une telle hâte de vous revoir, je profiterai du Grand Marché aux plantes, en bord de Saône pour monter à Lyon.
Ah, Lyon, votre ville, que je connais si peu ! J’aimerais vous inviter un soir de votre choix à l’Opéra que vous affectionnez, je crois tout autant que notre Carlita (certainement une de nos plus remarquables voix).
A moins que vous ne me conseilliez un autre spectacle ?
Très chère Marie-Caroline, je vous supplie d’accepter mon invitation.
J’espère une réponse rapide car la Foire aux plantes débute dans un mois, jour pour jour et je sais, par mon oncle, Monsieur Fouquet que Nicolas Ier sera là pour l’inaugurer. Qui sait il nous amènera peut-être sa petite Giulia, sa petite fleur à lui ?
Respectueusement vôtre
François Fouquet